Le statut des Ecritures :

examen de la valeur du principe externe et formel

de la foi réformée confessante

Pasteur Vincent BRU

  

I. Les enjeux du débat

II. Le point de la situation

III. Examen du bien fondé du principe externe et formel de la foi réformée confessante

A. Un triple témoignage en faveur de l’inerrance-infaillibilité de la Bible

    1. Le témoignage de l’Ecriture

    2. Le témoignage de l’histoire

    3. Le témoignage intérieur du Saint-Esprit

B. L’Alliance, fondement de l’inerrance-infaillibilité de l’Ecriture

C. L’inspiration et l’inerrance de la Bible : définition du dogme et réponses aux objections

    1. Définition du dogme

    2. Objections et réponses

a) Les objections des " critiques "

b) Les objections des " néo-évangéliques "

Conclusion

Notice bibliographique sur l'Ecriture

 

 

La question du statut des Ecritures est sans aucun doute l'une des plus importantes et des plus déterminantes pour la définition de la Foi et l'orientation de l'ensemble du discours théologique.

D'aucuns ont vu dans celle-ci la pierre de touche de tout le système théologique, comme aussi l'une des principales pomme de discorde entre théologiens de tendances différentes (orthodoxes et libéraux, catholiques et protestants, etc.).

Poser la question du statut des Ecritures, c'est s’interroger forcément sur le fondement même de la foi chrétienne, sur son principe formel, en contraste avec son principe matériel qui est la foi.

La question qui se pose est la suivante : La Bible est-elle simplement un document humain, une émanation du peuple de Dieu, un compte-rendu de la vie du peuple de Dieu et de ses expériences religieuses, ou bien est-elle véritablement la Parole de Dieu qui s'adresse à l'homme ? Ou encore : En quel sens la Bible est-elle la Parole de Dieu ?

Dans cette étude nous nous proposons, après avoir mis en évidence les enjeux de la question et dressé un tableau de la situation actuelle, de montrer le bien fondé de la position réformée classique au sujet de l’inerrance de la Bible. Nous considérerons en particulier la nature divino-humaine de l’Ecriture en relation avec la notion d’Alliance, celle-ci constituant le cadre constitutionnel de la révélation biblique, et sa raison d'être. Enfin, nous nous efforcerons de répondre aux principales objections à la doctrine de l’inerrance-infaillibilité de la Bible.

 

I. Les enjeux du débat

Les enjeux de la question du statut des Ecritures sont considérables, car c’est d’elle que dépendent en définitive toute la théologie et la vie de l’Eglise1. La conception que l’on a de la nature de l’Ecriture a des implications dans des domaines aussi variés que l’interprétation de la Bible, la valeur du dogme et de la morale chrétienne, la spiritualité, la certitude de la foi, ou encore la nature de l’Eglise.

L’enjeu pour l'interprétation des textes bibliques : toutes les interprétations sont-elles forcément légitimes, aussi légitimes les unes que les autres ? Jusqu’où peut-on aller dans l’acceptation des différentes méthodes d’interprétation de la Bible ? Peut-on poser des bornes au pluralisme théologique issu de ces différentes approches de la Bible ?

L’enjeu pour la stabilité du dogme et de la morale : au-delà de l'évolution des moeurs qui tend à nous imposer ses nouveaux schémas, est-il possible d’établir un corps de doctrines, un Credo, qui puisse constituer le fondement objectif, pour tous les temps, de la Foi de l’Eglise ? Est-il légitime de concevoir un fondement objectif, une norme au droit et à la morale ?

L’enjeu pour la spiritualité chrétienne : est-il possible de fonder de façon objective l’expérience religieuse, la piété, en dehors de nos sentiments humains ? Existe-t-il un critère de vérité permettant de juger de la valeur d’une expérience religieuse, d’une spiritualité même " chrétienne ", qui sont par nature subjective, et donc sujettes à l’erreur ? La vérité existe-t-elle en dehors des sentiments humains ?

L’enjeu pour la certitude de la foi : la relation de confiance absolue entre Dieu et le fidèle est conditionnée par " les faits qui lui servent de fondement, les faits confessés dans le symbole apostolique comme objets de la foi. "2 La véracité de ces faits dépend à son tour de la nature de l’Ecriture, selon que celle-ci est plus ou moins digne de confiance, plus ou moins sujette à l’erreur.

L’enjeu pour la nature de l’Eglise : s’il est de la vocation de l’Eglise, de sa nature, de proclamer et de vivre la " vérité dans la charité ", et de rechercher " l’unité par le lien de la paix ", dans quelle mesure peut-on concevoir un certain pluralisme, ou pluralité, au sein de l’Eglise, tout en maintenant son caractère confessionnel ? Une Eglise peut-elle être à la fois " pluraliste " et " confessionnelle " ?

Il apparaît que la réponse à ces différentes questions dépend plus ou moins directement de la nature que nous reconnaissons au texte biblique. La confusion qui règne aujourd’hui dans beaucoup d’Eglises sur toutes ces questions est significative de la diversité de vues concernant le statut des Ecriture.

 

II. Le point de la situation

Si tous les théologiens chrétiens s'accordent pour reconnaître à la Bible une certaine autorité, tous ne s'entendent pas forcément sur la nature de cette autorité. Que la Bible ait la prétention d'être la "Parole de Dieu", cela, nul ne le conteste, mais les choses se compliquent dès lors qu’il s’agit d’en préciser le sens.

C’est ainsi que pour la théologie moderne, héritière du libéralisme rationaliste et anthropocentrique d’un Schleiermacher (1768-1834) – le père du libéralisme –, de la pensée dialectique d’un Karl Barth (1886-1968), ou du fidéisme subjectif d’un Auguste Sabatier (1839-1901), c'est à tord que l'on considère la Bible comme étant, à proprement parler, la Parole de Dieu : la Bible n'est pas la Parole de Dieu, mais elle est, au mieux, un témoignage humain rendu à la révélation, à la Parole de Dieu qui est le Christ. Ainsi, la Bible n’aurait pas, au sens strict du terme, le statut de révélation ou de Parole de Dieu. La révélation est au-delà de l’Ecriture, qui n’en constitue qu’un humble témoin, faillible, et donc sujet à la critique. D’où une ample utilisation de la méthode dite " historico-critique " qui ne signifie rien d’autre que " l’application aux documents bibliques des méthodes rationnelles ou scientifiques telles qu’elles s’exercent dans d’autres domaines de l’étude… " (Ch. DODD)3

Pour ne prendre qu’un seul exemple récent, le dossier consacré à la Bible dans l’Encyclopédie du protestantisme est hautement significatif. Dans celui-ci, en effet, le texte biblique est avant tout " témoignage ", distinct de la révélation : " la lettre du texte ne saurait être comme telle la vérité, mais elle renvoie au Christ, à la "doctrine" ou à la "substance" de la vérité salutaire "4. Henry Mottu, dans un article récent de la revue Hokhma va dans le même sens lorsqu’il affirme : " La Bible, comme texte fondateur, témoigne de la Parole de Dieu ; elle est servante de la Parole. "5

Ainsi, il n’est pas étonnant d’assister aujourd’hui a une dévaluation de l’autorité de la Bible, et conjointement à une véritable floraison de "grilles d'interprétation" ou de "méthodes de lecture" de la Bible, toutes plus ou moins contradictoires. Le fait d’approcher la Bible comme un document humain seulement, en mettant de côté son origine divine, donc unique, détermine le type de lecture à la fois critique, subjective et anthropocentrique de la théologie moderne.

Le point de vue évangélique est tout autre, puisqu’il maintient sur ce point les grandes affirmations de l’Eglise ancienne, et de l’orthodoxie en général, qui considère le texte de l’Ecriture comme étant revêtu de l’autorité-infaillibilité de Dieu lui-même, parce qu’émanant de lui seul6. C’est précisément cette relation spécifique des " évangéliques " au texte de l'Ecriture qui range ces derniers, dans l’esprit des théologiens modernes, dans la catégorie des " fondamentalistes " ou " conservateurs " ou encore " ultra-orthodoxes " – ce qui leur vaut souvent d’être marginalisés au sein de l’idéologie protestante contemporaine, telle que représentée notamment dans l’Encyclopédie du protestantisme.

Notons cependant que depuis les années soixante, un nouveau courant a vu le jour au sein de la mouvance évangélique, qui a remis en question la doctrine classique de l’inerrance, en proposant un point de vue plus nuancé – d’où leur nom de " néo-évangéliques "7. Aux Etats-Unis8, le Fuller Seminary – de tendance " évangélique " – élimine l’inerrance de sa Confession de Foi, et s’inscrit en faux contre les positions défendues notamment par J.G. Machen, de la Faculté de Théologie de Westminster, ou C.F. Henry. Dans les années soixante dix, une réaction orthodoxe a lieu autour du thème de l’inerrance9, et donne le jour, en 1977, au Conseil International pour l’Inerrance, auquel on doit les Trois Déclarations de Chicago : " Sur l’inerrance biblique " (1978), " Sur l’herméneutique biblique " (1982) et " Sur l’application de l’enseignement biblique " (1986).

Dans le chapitre qui suit, nous nous proposons d’examiner le bien fondé du principe externe et formel de la foi réformée confessante selon lequel l’Ecriture est la Parole inspirée de Dieu, revêtue du caractère d’infaillibilité – ou inerrance –, étant de ce fait reçue comme la norme souveraine et intangible pour la vie de l’Eglise et du chrétien.

 

III. Examen du bien fondé du principe externe et formel de la foi réformée confessante

Nous nous proposons d’aborder la question sous trois angles complémentaires :

1. Les " témoignages " en faveurs de l’inerrance-infaillibilité ;

2. Un éclairage oblique : la théologie de l’Alliance ;

3. Définition du dogme et réponses aux objections.

 

A. Un triple témoignage en faveur de l’inerrance-infaillibilité de la Bible

1. Le témoignage de l’Ecriture

Pour le chrétien, soucieux de suivre l'enseignement de son Seigneur, la manière dont le Christ concevait l'autorité de l'Ecriture est déterminante, plus que toutes autres raisons. Comme l'affirme fort justement Pierre Marcel : " Pour nous, la pensée du Maître est canonique. Elle est une autorité extérieure plus haute que toutes les autorités rabbiniques, ecclésiastiques, scientifiques, les plus vénérables ". Et encore : " Le témoignage de Jésus dans l'histoire dépose en faveur du canon hébreu, de l’authenticité et de l'historicité de nombreux faits, et le témoignage du Saint-Esprit dans le coeur dépose en faveur des affirmations de Jésus. "10

Pour Jésus, l’Ancien Testament est revêtu de l’autorité divine, de sorte que l’expression qui revient sans cesse dans sa bouche, " il est écrit ", est synonyme de " Dieu dit "12 : ce que la Bible dit, Dieu le dit. A ce titre, il est intéressant de noter que les citations de l'Ancien Testament " se réfèrent toujours à des Ecritures canoniques et ne sont jamais employées par les écrivains du Nouveau Testament pour désigner les Apocryphes. "13

Au témoignage de Jésus vient s’ajouter le témoignage des Apôtres pour lesquels les écrivains sacrés ont été comme portés par le Saint-Esprit dans la rédaction de la Bible (2 Pie. 1 : 19-21), de sorte que l’Ecriture tout entière est theopneustos, " souffle de Dieu ", c’est-à-dire formée par le souffle divin lui-même (2 Tim. 3 : 16).14

Ce qui est vrai pour l’Ancien Testament l’est aussi pour le Nouveau. Jésus a, en effet, authentifié, de façon prophétique, le Nouveau Testament, en énonçant à ses Apôtres le principe qui est à la base de la formation du Canon biblique par l’action de l’Esprit Saint (Jn 14 : 26 ; 16 : 12ss, 17 : 14-19).

 

2. Le témoignage de l’histoire

La manière dont les théologiens de l’Eglise ancienne, les docteurs de l’Ecole, les Réformateurs et les post-Réformateurs ont considéré le statut de l’Ecriture dépose en faveur de l’inerrance biblique. La théologie réformée confessante entend maintenir sur ce point l’orthodoxie historique.

" La théologie "évangélique" maintient, sur le statut et les caractères de l’Ecriture, ce qu’ont cru et enseigné les Pères de l’Eglise, les Docteurs de l’Ecole et, particulièrement les Réformateurs du XVIe siècle. "15

" Si le consentement unanime des Pères n'est pas une chimère, si la constance, la perpétuité et l'universalité d'une doctrine est une règle de foi, il n'est pas de dogme plus solidement établi que l'inerrance de l'Ecriture. "16

 

3. Le témoignage intérieur du Saint-Esprit

C’est sans doute l’une des spécificités de la théologie réformée que de faire dépendre ultimement la certitude de la foi de ce que Calvin a désigné comme " le témoignage intérieur du Saint-Esprit " :

" Ainsi, que ce point nous soit résolu, qu’il n’y a que celui que le Saint-Esprit aura enseigné, qui se repose en l’Ecriture en droite fermeté ; et bien qu’elle porte avec soi sa créance – autopistos – pour être reçue sans contredit et n’être soumise à preuves ou arguments, toutefois que c’est par le témoignage de l’Esprit qu’elle obtient la certitude qu’elle mérite (…) par-dessus tout jugement humain, nous arrêtons indubitablement qu’elle nous a été donnée de la propre bouche de Dieu par le ministère des hommes… "17

Henri Blocher reprend l’argument : " Parole de Dieu, l’Ecriture s’accrédite objectivement elle-même ; mais notre infirmité rend nécessaire pour nous le témoignage intérieur du Saint-Esprit, pour que nous lui donnions la foi qu’elle mérite, et son illumination, pour que nous percevions droitement le sens. "18

 

B. L’Alliance, fondement de l’inerrance-infaillibilité de l’Ecriture

La notion d'Alliance19 permet d'appréhender de façon juste et appropriée la nature à la fois divine et humaine de l'Ecriture. Celle-ci pose en effet le principe de la souveraineté et de la priorité absolues de Dieu dans l'Alliance, tout autant que de la responsabilité de l'homme, comme partenaire de l'Alliance – co-ouvrier avec Dieu.

L'Alliance concerne à la fois Dieu et l'homme, tout en magnifiant la liberté souveraine de Dieu qui agit véritablement dans l'histoire – il est la Cause première de toutes choses –, et ce, par le biais de causes secondes réelles.

Ainsi en est-il de l'Ecriture. Celle-ci est à la fois pleinement divine et pleinement humaine, elle est la Parole de Dieu dans la parole des hommes. Autrement dit : Dieu est l'Auteur principal de la Bible – et à ce titre elle est revêtue de la même autorité et infaillibilité –, tandis que ses auteurs humains ne le sont qu'à titre secondaire, et qu'en tant que partenaires de l'Alliance.

Dans le cas de l'Incarnation, comme dans celui de l'"inscripturation", nous avons affaire à une intervention spéciale de Dieu, en vue de la rédemption, intervention qui manifeste sa souveraineté sur le monde dont il est le Créateur et le Sauveur.

Rappelons que l’Alliance, au sens matériel – le contenu de l’Alliance – équivaut à Loi + Evangile + commandements + promesses ; la structure formelle de l’Alliance comprenant, conformément à la structure du Décalogue (Ex. 20) : un préambule, désignant l’identité du Suzerain (Ex. 20 : 2a), un prologue historique, racontant l’exploit historique du Suzerain vis-à-vis de son vassal (Ex. 20 : 2b), suivi des stipulations : énumérations des obligations de gratitude et de confiance du vassal envers son Suzerain, avec les promesses et les menaces qui lui seront appliquées selon la fidélité ou l’infidélité aux stipulations du Traité (Ex. 20 : 3-17). Ainsi, comme l’affirme Pierre Courthial : " Dès son noyau : le Décalogue … l’Ecriture s’est constituée, avec sa pleine autorité de Parole de Dieu, comme Traité de l’Alliance du Seigneur avec son peuple, du Christ-Epoux avec son Eglise-Epouse ", et un peu plus loin : " Si la structure rédactionnelle de telle ou telle partie de l’Ecriture … est exactement en forme de " traité d’alliance ", en tous points comparable à celle des traités d’alliance du second millénaire avant notre ère … c’est l’Ecriture tout entière qui est, sinon en forme, du moins en contenu de sens, Traité d’Alliance, si bien que toutes les parties et tous les genres littéraires de la Bible concourent à l’expression de l’Alliance que Dieu a établie entre lui et son peuple. "20

 

C. L’inspiration et l’inerrance de la Bible : définition du dogme et réponses aux objections

Pour la théologie réformée classique, la doctrine de l’inerrance de la Bible va de pair avec celle de l’inspiration. Si Dieu-le Saint-Esprit est bien l’Auteur premier des Ecritures, alors celles-ci ne sauraient nous induire en erreur en quoi que ce soit : l’inerrance-infaillibilité de la Bible sont celles de Dieu lui-même.

 

1. Définition du dogme

Selon Henri Blocher, " l'inspiration des prophètes et des apôtres, aux modes divers et mystérieux, leur a permis de parler et d’écrire sans distorsion aucune comme les porte-paroles mandatés par Dieu, si bien que leur parole humaine est pleinement Parole de Dieu, revêtue de sa souveraine autorité. "21

La Délaration de Chicago est plus explicite encore : " Nous affirmons que l’Ecriture entière et toutes ses parties, jusqu’aux mots mêmes de l’original, ont été données par inspiration divine. Nous rejetons l’opinion selon laquelle l’Ecriture serait inspirée comme un tout mais non pas en chaque partie, ou, au contraire, en certaines de ses parties mais non pas en son tout. "22

Trois remarques s'imposent ici.

1. L'inspiration est un don spécial, qui s'inscrit dans le cadre de l'histoire de la révélation et de la rédemption. En ce sens, elle appartient au passé et est non reconductible - les écrivains sacrés en ont bénéficiés, et eux seuls.

Ainsi s'exprime Paul Wells : " La "théopneustie" est un don spécial qui s’exerce uniquement dans "l’inscripturation" des textes qui sont Parole de Dieu. Elle est accordée à des personnes choisies dans ce but, au moment de la rédaction des Ecritures sous l’action du Saint-Esprit. "23

Il nous parait d'autant plus important d'affirmer ce point que la tendance à l'illuminisme - où chacun se prétend "inspiré" au même titre que les Apôtres - se fait particulièrement sentir parmi ceux qui ont rejeté la doctrine classique de l'inspiration de la Bible.

2. La doctrine de l'inspiration entend rendre compte d'une réalité qui échappe à notre pleine saisie, la réalité d'un Dieu qui entre en communication avec les hommes en s'accommodant à leurs capacités, sous la forme d'une révélation verbale, propositionnelle. Comme pour tout ce qui a trait aux réalités célestes, il s'agit là d'un mystère qui demande à être cru, à être reçu par la foi.

A ce titre, la théologie réformée n'entend aucunement spéculer sur les modalités de l'inspiration ("mécanique", "organique", "dynamique", etc.), pas plus qu’elle n'entend le faire pour la doctrine de la Trinité ou de la double nature du Christ. Ce qui compte, en définitive, c'est le résultat : les textes ainsi produits du miracle de l'inspiration, sont tous ensembles et chacun en particulier, la Parole de Dieu dans la parole des hommes, pleinement dignes de confiance et non sujets à l'erreur - ils ne sauraient nous tromper en quoi que ce soit - par rapport au but que Dieu, dans sa Providence, leur a désigné.

" Les dogmaticiens calvinistes actuels ont eu … raison, à notre sens, d'insister sur le caractère organique et personnel de l'inspiration mieux que ne l'avaient fait, sans doute, leurs devanciers du XVIIe siècle. Ils ont eu raison, d'autre part, de revenir sur certaines conceptions hasardeuses de ceux du XVIIIe siècle, comme Bénédict Pictet, qui réduisait l'inspiration aux idées. Mais il n'est pas certain, estimons-nous, qu'ils ne soient pas trop exclusifs en condamnant, en bloc, le procédé automatique. Dieu est libre, totalement libre dans les modes d'inspiration qu'il lui plaît d'adopter. Sa sagesse est infiniment variée. Il faut prendre l'inspiration comme elle se donne. "24 Et encore : " L'Inspiration s'accommode parfaitement de tous les procédés littéraires en usage dans le temps où elle s'exerce. "25

3. Ce qui ressort, en définitive, de la doctrine réformée classique de l'inspiration, c'est que Dieu est véritablement l'Auteur premier de l'Ecriture, de la même façon qu'Il est, dans tous les sens du terme, l'Auteur du Salut. Et cependant, comme dans la conversion où la responsabilité de l'homme est réelle, ce sont des hommes qui ont écrit la Bible, avec leurs "bagages" culturels, leurs connaissances du moment, leurs styles et leurs tempéraments. C'est là tout ce qui fait la vraie humanité de l'Ecriture : pleinement divine, et pourtant pleinement humaine.

" Dans l'inspiration, Dieu est l'auteur primordial (auctor Primarius). C'est lui qui détermine l'auteur sacré à parler (respect. à écrire) et à exprimer les vérités que Dieu veut faire connaître aux hommes. Mais l'auteur sacré est bien l'auteur secondaire réel de ce qu'il dit ou écrit avec ses moyens intellectuels, littéraires et philologiques, avec ses souvenirs et conformément aux résultats, le cas échéant, de ses efforts personnels de recherches (Luc 1, 3,4). A l'indéfectibilité, à l'inamissibilité de la grâce dans la conversion, correspond l'inerrance dans le cas de l'inspiration. "26

Venons-en maintenant au corollaire de la doctrine de l'inspiration qui est celle de l'inerrance-infaillibilité de la Bible.

Selon Henri Blocher : " L'infaillibilité-inerrance signifie ceci : quand les écrivains sacrés, dans l'Ecriture, de manière explicite ou implicite, prétendent énoncer quelque chose de juste ou vrai, c'est à bon droit qu'ils le font. Tout ce qu'ils affirment (dans leur situation et selon les conventions de leur langage) mérite l'entier assentiment du lecteur (oui et amen) : aucun progrès du savoir ne peut conduire à le rejeter ou le rectifier, cela même sous un seul des aspects impliqués : nul n'aura jamais de quoi s'inscrire en faux contre une assertion de l'Ecriture. "27

Cette dernière définition amène trois remarques.

1. Ce qui est visé dans la doctrine de l'inerrance-infaillibilité, c'est la qualité des textes produits de l'inspiration : ils sont entièrement dignes de confiance ; ils sont sûrs et certains. Ou dit négativement : ils ne sauraient en aucun cas nous induire en erreur - sur Dieu, sur l'homme, sur la réalité du salut, le sens de l'histoire, etc.

Il s'ensuit donc que l'Ecriture constitue, dans son ensemble comme dans chacune de ses parties, la Parole-infaillible de Dieu, la norme souveraine en matière de foi et de vie, de sorte que "nul n'aura jamais de quoi s'inscrire en faux contre une assertion de l'Ecriture."28

2. L’épithète "infaillible", qui a l'avantage de l'ancienneté, met plus particulièrement l'accent sur le caractère propre de la Bible comme Parole de Dieu qui communique infailliblement la pensée de Dieu aux hommes, sans rien laisser de côté. "Inerrance" (du latin inerrantia) présente néanmoins l'avantage de préciser de quel genre d'infaillibilité il s'agit, et quelle est son étendue : l'Ecriture est "sans erreur", et c'est pourquoi elle est "infaillible".

" Nous affirmons que l’Ecriture, divinement inspirée, est infaillible, de telle sorte que, loin de nous égarer, elle est vraie et sûre sur tous les points qu’elle traite. Nous rejetons l’opinion selon laquelle la Bible pourrait à la fois être infaillible et errer dans ce qu’elle énonce. On peut distinguer infaillibilité et inerrance, mais non les séparer. "

3. Il va de soit que dire que la Bible est inerrante et infaillible ne prétend aucunement résoudre tous les problèmes, ni statuer de façon ferme et définitive sur le champ de cette inerrance-infaillibilité. Comme pour la doctrine de l'inspiration, ce qui est visé, c'est le résultat, et les conséquences immédiates de celui-ci.

Que la Bible soit entièrement digne de confiance, quelle soit véritablement la Parole de Dieu, la communication de la Vérité de Dieu dans nos mots humains, implique nécessairement que nous traitions cette Parole avec respect et humilité. L'exégèse se voudra alors servante de l'Ecriture, soucieuse de l'unité-diversité de son message, selon le principe de l'analogie de la foi selon lequel l'Ecriture ne saurait se contredire.

Est-ce à dire qu'il n'y a pas de difficultés dans la Bible ? Pas de contradictions apparentes ? Sans parler des " inexactitudes " scientifiques ou chronologiques ?

Il va de soit que le concept même d'infaillibilité ou d'inerrance, pour être bien compris, implique une juste vision des critères propres de l'Ecriture quant à la notion même de vérité qui, au regard du plan du salut de Dieu, n'implique pas forcément l'exactitude mathématique, scientifique - au sens moderne du terme - de tous les détails qui apparaissent dans le texte. Et ce, d'autant plus que le but de l'Ecriture - lequel but est bel et bien atteint infailliblement jusque dans les plus petits détails du texte biblique -, n'est pas de nous fournir un traité de zoologie, de cosmologie, de géologie, ni même une documentation historique du peuple de Dieu selon les exigences de l'historiographie moderne, mais bien de nous amener à la foi en Jésus-Christ Fils de Dieu.

Une juste compréhension de l’inerrance-infaillibilité de la Bible évite les écueils du maximum – l’Ecriture est inerrante jusque dans les plus petits détails scientifiques et historiques, voire jusque dans la traduction et la transmission des textes29 – et du minimum – la Bible n’est infaillible qu’eu égard au dessein de salut de Dieu qui s’accomplit infailliblement dans l’histoire ; le champ de l’inerrance restreint à la foi et aux mœurs. Pour reprendre les mots d’Henri Blocher : " Parole de Dieu, l’Ecriture est sûre en tout ce qu’elle enseigne ou affirme, c’est-à-dire infaillible ou inerrante. Ne sont pas exclues les erreurs des copistes, la non-conformité aux conventions grammaticales et stylistiques, l’usage des tropes et de tous les procédés de langage admis à l’époque de rédaction au service d’une communication véridique. "30

Comme l’affirme la Déclaration de Chicago : " Nous affirmons que le mot inerrance convient, comme terme théologique, pour caractériser l’entière vérité de l’Ecriture. Nous rejetons la démarche qui impose à l’Ecriture des canons d’exactitude et de véracité étrangers à sa manière et à son but. Nous rejetons l’opinion selon laquelle il y aurait démenti de l’inerrance quand se rencontre des traits comme ceux-ci : absence de précision technique à la façon moderne, irrégularités de grammaire ou d’orthographe, référence aux phénomènes de la nature tels qu’ils s’offrent au regard, mention de paroles fausses mais qui sont seulement rapportées, usage de l’hyperbole et de nombres ronds, arrangement thématique des choses racontées, diversité dans leur sélection lorsque deux ou plusieurs récits sont parallèles, usage de citations libres. "31

 

2. Objections et réponses

Nous distinguerons deux catégories d’objections à la doctrine classique de l’inerrance : celles émanant des différents courants critiques rationalistes de la Bible, représentés notamment par la méthode historico-critique, et celles, plus subtiles, émises par le courant néo-évangélique.

a) Les objections des " critiques "

L’objection qui revient le plus souvent à l’encontre de la doctrine classique de l’inerrance s’appuie sur les difficultés de la Bible, ses apparentes contradictions. La Bible, dit-on, fourmille de contradictions et d’erreurs palpables. Il est donc nécessaire de distinguer l’élément humain de la Bible de son élément divin, en fonction de certains critères qui varient selon les écoles théologiques.

D’aucuns prétendent que les " résultats acquis " de la critique biblique ont définitivement remis en question le dogme de l’orthodoxie protestante eu égard à l’inerrance.

Cependant, sans rejeter en bloc le travail prodigieux de la critique moderne – tous les " critiques " ne sont pas forcément mal attentionnés –, observons avec Auguste Lecerf le " caractère irrémédiablement subjectif de toute critique portant sur des questions fondamentales en relations avec les principes de la vie spirituelle. "32 Il convient donc, en pareil domaine, d’être particulièrement vigilant vis-à-vis d’une " tendance apologétique  inconsciente ", marquée par l’humanisme subjectiviste et évolutionniste ambiant, pouvant conduire les théologiens critiques " à opter, dans les cas douteux [les difficultés de l’Ecriture], presque invariablement pour la solution négative. "33

Il résulte de cela que beaucoup de "faits acquis" ne le sont, en réalité, " que pour ceux qui acceptent l’idéologie de Kantienne, Hégélienne ou Comtiste ", qui repose sur " une base essentiellement subjective ", tandis que le croyant n’a rien à craindre des résultats d’une critique, d’une " science libérée de l’idéologie humaniste et évolutionniste. "34

Sur les "diversités" et divergences de détail entre deux récits de deux auteurs différents : Nous partageons l’avis d’Auguste Lecerf selon lequel : " L'essentiel est que les auteurs s'accordent sur le "principal" qui est le seul objet réel de leur affirmation. On peut donc reconnaître des inexactitudes de détail dans la présentation des faits et des décalages chronologiques, tout en maintenant que les deux auteurs ont joui du privilège de l'inerrance pour atteindre le but qu'ils se proposaient sous l'impulsion d'une inspiration intégrale. Cette inspiration, en effet, ne suppose l'inerrance que par rapport au but qu'elle révèle à celui qui en est l'organe. "35 Cependant que nous ajoutons avec Henri Blocher : " Au contraire, il y aurait entorse à l’infaillibilité si l’écrivain sacré fournissait un renseignement inexact (incorrect), dans son ordre, même s’il ne s’agissait que d’un point secondaire … ou d’une remarque jetée en passant, incidemment. "36

Sur les erreurs scientifiques : Il convient ici de faire valoir le fait que l'Ecriture ne donne pas elle-même sa propre vision scientifique du monde, le langage de la Bible étant celui de l'expérience sensible et naïve. Les affirmations "scientifiques" de l'Ecriture ne sauraient par conséquent être interprétées dans le sens d'une vision du monde primitive liée aux conceptions erronées de l'époque.

" Nous n'avons aucun embarras à reconnaître avec le calviniste H. Bavinck que les auteurs sacrés partageaient sur ces matières les opinions des hommes de leur temps. Mais nous maintenons que l'Ecriture ne nous impose pas de croyances scientifiques erronées pour l'excellente raison qu'elle ne se propose pas de présenter un enseignement systématique sur les sciences. " Que celui qui veut connaître l'astrologie et les secrets de la nature s'adresse ailleurs ", dit Calvin, commentant le premier chapitre de la Genèse. " ; " D'une manière générale, nous ferons observer que l'Ecriture, quand elle fait allusion à des faits de l'ordre naturel, parle le langage toujours vrai subjectivement de l'apparence sensorielle. "37

Sur les erreurs théologiques ou morales : Notons qu’il serait bien mal aisé de trouver dans la Bible de véritables contradictions théologiques ou morales, tant on ne peut que constater l’unité remarquable de la révélation de Dieu dans les Ecritures. Cependant, " les différences de Points de vue théologiques, quand elles sont réelles, s'expliquent non par un progrès de l'inspiration qui est un fait ne comportant pas de degrés, mais bien par un progrès dans la révélation qui est plus ou moins étendue, même chez des auteurs inspirés appartenant à la même économie de l'alliance de grâce et qui est toujours partielle même chez les inspirés les plus éminents. "38

Pour conclure sur ce chapitre, nous dirons avec Auguste Lecerf : " Nous ne prétendons nullement, certes, avoir en main une baguette magique capable de faire disparaître toutes les objections de détail. Il y a dans l'Ecriture des difficultés actuellement insolubles pour nous et qui resteront probablement telles jusqu'au dernier jour. Nous nous contentons de montrer qu'on n'a pas le droit de prétendre qu'il est désormais impossible à un chrétien au courant des faits de croire à la vérité du principe formel de la foi réformée, qui est que l'Ecriture, dans toutes ses parties, a été donnée par l'inspiration de Dieu et que la parole contenue dans les livres sacrés procède de Dieu et non des hommes. "39

 

b) Les objections des " néo-évangéliques "

La position des néo-évangéliques sur l’inerrance-infaillibilité de la Bible se fait particulièrement sentir sur la question de l’accommodation. En effet, pour G. C. Berkouwer et G. W. Bromiley, l'accommodation concerne non pas tant l'utilisation par Dieu du langage humain comme véhicule de sa révélation, mais l'adaptation nécessaire des écrivains sacrés aux conceptions erronées de leur temps, du moins pour les vérités d'un autre ordre que théologique - distinction vérités fondamentales, relatives au salut, et vérités périphériques, d'ordre historique et culturel. Le caractère culturel et humain de l'Ecriture - timeboundedness - impliquerait la présence dans celle-ci d'une certaine marge d'erreurs. Ainsi, il y aurait tension, dualité, entre la forme et le contenu de l'Ecriture, entre son autorité historique et son autorité normative.40

A cela nous répondons que l'humanité et l'historicité de l'Ecriture, loin de compromettre son infaillibilité, en garantissent au contraire sa compréhensibilité et sa clarté, et donc aussi son autorité normative pour tous les temps, Dieu étant parfaitement à même d'utiliser le langage humain ainsi que les représentations historiques et culturelles de l'homme, pour communiquer de façon infaillible sa volonté aux hommes.

Le caractère normatif de l'Ecriture n'est pas limité par le temps, dans le sens d'un compromis avec l'erreur, mais plutôt conditionné par celui-ci - la révélation-accommodation revêt la forme historique et culturelle de son temps, sans pour autant adopter les conceptions erronées de celui-ci. La distinction - ou dualité - entre vérité périphérique - historico-culturelle - et vérité fondamentale - normative - n'a pas lieu d'être. Il n'y a, dans l'Ecriture, qu'une seule vérité, et cette vérité revêt la forme historique et culturelle de l'époque dans laquelle elle s'est manifestée.

Comme l’affirme la Déclaration de Chicago : " Nous affirmons que l’inspiration, sans conférer d’omniscience, a garanti que les énoncés des auteurs bibliques sont vrais et dignes de foi sur tous les sujets dont ils ont été conduits à parler ou écrire. Nous rejetons l’opinion selon laquelle la finitude ou la nature pécheresse de ces auteurs aurait, de manière nécessaire ou non, introduit quelque fausseté, quelque distorsion, dans la Parole de Dieu. "41 Et encore : " Nous affirmons que l’Ecriture dans son intégralité est inerrante, exempte de toute fausseté, fraude ou tromperie. Nous rejetons l’opinion qui limite l’infaillibilité et l’inerrance aux thèmes spirituels, religieux, ou concernant la rédemption, et qui exclut les énoncés relevant de l’histoire et des sciences. Nous déclarons, en outre, illégitime l’emploi d’hypothèses scientifiques sur l’histoire de la terre pour renverser l’enseignement de l’Ecriture sur la création et le déluge. "42

 

Conclusion

L'inspiration plénière de l'Ecriture, dont dépend son autorité normative et son caractère d’infaillibilité, est une doctrine qui demande à être cru, qui s'offre à notre foi, et non pas à être démontrée rationnellement.

Le statut que l'on reconnaît à l'Ecriture dépend de la vision que l'on a de Dieu et de son intervention dans le monde, de sa providence.

Soit l'on présuppose que Dieu, en contraste avec les affirmations claires de l'Ecriture elle-même, est radicalement différent du monde et de ses créatures - notion du Dieu Tout Autre, etc.-, et auquel cas l'Ecriture est ramenée à un simple témoignage humain, donc faillible, à une Parole qui nous transcende absolument, soit l'on part du présupposé biblique d'un Dieu-providence, à la fois transcendant et immanent, et auquel cas on reconnaît le caractère divino-humain de l'Ecriture, vraie Parole de Dieu dans la parole des hommes, inerrante, parce que pleinement inspiré par Dieu.

Comme le dit Paul WELLS : " L'Incarnation et l'inscripturation sont impossibles si Dieu n'est pas le maître de la nature et de l'histoire, s'il ne mène pas toutes choses selon son conseil. "43

La bonne attitude nous paraît être celle préconisée par l'Ecole dite "présuppositionnaliste", dont l'un des chefs de fil est le théologien américain, décédé récemment, Cornelius van TIL.

Il vaut mieux présupposer la vérité de l'Ecriture, qui maintient dans son entier l'affirmation de la souveraineté absolue de Dieu tout autant que de sa présence agissante dans le monde, par sa Parole et par son Esprit.


1. Selon Henri Blocher : " l’expérience montre que les individus (les institutions plus rarement) peuvent souvent rester fidèles aux autres articles de l’orthodoxie évangélique quand ils ont abandonné l’inerrance. Mais logiquement cette décision ne peut passer pour secondaire en importance : elle affecte de principium cognoscendi externum, le " juge des controverses " dans l’Eglise, le critère suprême de la pensée chrétienne … dès qu’on admet la possibilité d’erreurs dans l’Ecriture, on pose ipso facto un autre critère que l’Ecriture (critère indispensable pour reconnaître l’erreur, nécessairement présent dans la désignation de l’erreur : méthode historico-critique, raison scientifique, phénoménologie, etc.). " Et encore : " La métaphore bien ajustée n’est pas pour nous celle des dominos, mais celle de la place forte près de la frontière du pays : son importance est stratégique ; en temps de paix, il est permis de ne pas s’en soucier, il n’est pas trop grave qu’elle se délabre ; mais vienne la contestation, la perte de la citadelle rend difficile de résister aux envahisseurs. " - " Inerrance et Herméneutique ", Dieu parle !, p. 93.

2. Auguste LECERF, Introduction à la dogmatique réformée, II, Paris, Je sers, 1938, chap. VI : "Examen de la valeur du principe externe et formel de la foi réformée. Théorie de l'inspiration", pp. 154.

3. C. H. DODD, La Bible aujourd’hui, Paris, Desclée de Brouwer, 1980, p. 31 – cité par P. MARCEL, " Face à la critique, Jésus et les Apôtres ", La Revue Réformée, supplément au N°147-1986/3, Aix-en-Provence, septembre 1986, p. 48. Comme le dit Paul WELLS, parlant de la méthode historico-critique : " Ces outils légitimes prennent une coloration particulière s’ils sont utilisés dans le cadre des présupposés de la méthode critique que décrivent les quatre mots : naturalisme, rationalisme, humanisme et évolutionnisme. Ces attitudes sont issues de l’humanisme des Lumières et du rationalisme du XVIIIe siècle et partent du principe que "l’Ecriture sainte est un recueil de documents de l’Antiquité qui doit être soumis à la même analyse et investigation que toute autre œuvre littéraire, fut-elle religieuse et théologique" " - Dieu a parlé, Québec, Ed. La Clairière, 1997, p. 215.

4. L'Encyclopédie du protestantisme, Paris et Genève, Cerf/Labor et Fides, 1995, dossier "Bible", pp. 106.

5. Henry MOTTU, "Dix thèses sur le statut des Ecritures", HOKHMA, N° 60 (1995), pp. 102. Voir de même sur le sujet : GOUNELLE, A. et VOUGA, F., "Thèses sur l'Ecriture", Etudes théologiques et religieuses, n° 59 (1984/4), pp. 523ss.

6. Comme articles récents sur le statut des Ecritures d’un point de vue " évangélique ", voir en particulier : Henri BLOCHER, "L'Ecriture et son interprétation, dix thèses", HOKHMA, N° 60 (1995), pp. 100-101 ; Pierre COURTHIAL, Le jour des petits recommencements, Lausanne, L'Age d'Homme, 1996, pp. 164ss. Le texte d’Auguste LECERF sur l’"Examen de la valeur du principe externe et formel de la foi réformée. Théorie de l'inspiration" reste d’une étonnante actualité - Introduction à la dogmatique réformée, II, Paris, Je sers, 1938, chap. VI, pp. 152ss. Voir de même de même, d'un point de vue catholique conservateur : Catéchisme de l'Eglise catholique, Paris, Mame/Plon, 1992, pp. 35s. COURTADE, "Inspiration et inerrance", in Dictionnaire de la Bible, Supplément IV, 482-553.

7. Parmi les théologiens de tendance néo-évangélique, mentionnons entre autre : F.F. Bruce, H. Ridderbos, G.W. Bromiley et G.C. Berkouwer. On retrouve ces positions dans The New International Encyclopedy of the Bible.

8. En Grande Bretagne, l’aile néo-évangélique est représentée notamment par les théologiens G. Goldigay et R. Bauckam, et par la revue Anvil. R.T. France se situe sur la tangente. H. Marshall, président de l’association européenne de théologiens évangéliques, défend un point de vue contrasté. En Allemagne, l’aile  " inerrantiste " est plus importante, malgré quelques hésitations sur la notion d’inerrance (G. Meier, etc.). Du côté catholique, le point de vue inerrantiste n’est pas, à proprement parler, représenté. Cependant, l’aile droite se caractérise par une position dogmatique à peu près identique au point de vue évangélique relatif à l’inerrance, excepté quelques concessions à la Critique (Feuillet, Carminiac, l’Abbé Lorentin, Congard, etc.). Si l’Encyclique Providentissimus Deus, à la fin du 19e siècle, affirmait l’inerrance – en réaction à l’infiltration de la critique rationaliste venue d’Allemagne, avec Renan, Loisy, Mgr d’Hulst, etc. –, Divino Afflonte Spiritu (en 1943, avec Pie XII) autorise la pratique de la critique biblique, telle que pratiquée déjà à l’Ecole Biblique de Jérusalem. Avec Vatican II, l’Encyclique Deim Verbum reste ambiguë sur la question de l’inerrance, ce qui explique la forte poussée du courant moderniste au sein de l’Eglise de Rome. – d’après un cours d’Henri Blocher à la FLTR d’Aix-en-provence, en février 1993, sur " Inerrance et herméneutique ".

9. Parmi les quelque 250 théologiens ayant participés au Conseil, mentionnons les théologiens de renom Henri Blocher, James M. Boice, Edmund Clowney, Roger Nicole, James Packer, etc.

10. Pierre MARCEL, Face à la Critique : Jésus et les apôtres, Genève/Aix-en-Provence, Labor et Fides/Kerygma, 1986, p. 45. Voir de même à ce sujet le livre de J.W. WENHAM, Christ and the Bible, Londre, Tyndale Press, 1972.

11. Cf. Mat. 21 : 42 ; 22 : 31s ; Jn 5 : 39 ; 10 : 34 ; Luc 24 : 44s ; Mc 12 : 36 ; Act. 1 : 16 ; etc.

12. Pierre MARCEL, op. cit., p. 15.

13. Voir de même 2 Pie. 3 :1 ; 1 Co. 14 : 37s ; 7 : 10ss, 40 ; 2 Co. 3 : 5s ; 1 Pie. 1 : 10-12 ; etc.

14. Voir de même 2 Pie. 3 : 16 où l’Apôtre Pierre conjoint les lettres de Paul au Canon de l’Ancien Testament, en leur conférant de ce fait la même autorité divine. En 2 Co. 3 : 5-6, l’Apôtre Paul fait état de son autorité épistolaire normative pour les communauté qu’il fonde : " La charge apostolique est d’origine divine et peut être comparée à la vocation de Moïse sous l’ancienne alliance " - Paul WELLS, Dieu a parlé, p. 62 ; cf. Peter JONES, " L’Apôtre Paul : étude sur l’autorité apostolique paulinienne ", Foi et Vie 75 (1976 : 1), pp. 36-58.

15. Henri BLOCHER, " L’Ecriture et son interprétation, dix thèses ", Hokhma 60/1995, p. 100.

16. F. PRAT, cité par G. COURTADE, "Inspiration et inerrance", Supplément au Dictionnaire de la Bible IV (1949), col. 524.

17. Jean CALVIN, I.C., I.VII.5.

18. Henri BLOCHER, " L’Ecriture et son interprétation, dix thèses ", Hokhma 60/1995, p. 100.

19. Sur la notion d’Alliance dans la Bible, voir en particulier : Palmer ROBERTSON, The Christ of the Covenants, Phillipsburg, P&R, 1980 ; M. G. KLINE, The Structure of Biblical Authority, Grand Rapids, Eerdmans, 1972.

20. Pierre COURTHIAL, " L’Ecriture, Traité d’Alliance ", Fondements pour l’avenir, p. 45.

21. Henri BLOCHER, " L’Ecriture et son interprétation, dix thèses ", p. 100. Sur la question de l'inspiration, voir en particulier les deux grands classiques : Louis GAUSSEN, Theopneustie (1840), réédité en 1988 sous le titre La pleine inspiration des Saintes Ecritures ou Theopneustie, St Légier, Ed. Emmaüs), et B. B. WARFIELD, The Inspiration and the autority of the Bible, Philadelphie, P&R, 1948.

22. 1ère Déclaration de Chicago, art. VI.

23. Paul WELLS, op. cit., p. 74.

24. Auguste LECERF, op. cit., p. 162 – c’est nous qui soulignons.

25. Ibid., p. 165.

26. Auguste LECERF, op. cit., p. 160s.

27. Henri BLOCHER, " Inerrance et herméneutique ", Dieu parle !, Aix-en-Provence, Ed. Kerygma, 1983, p.88.

28. 1ère Déclaration de Chicago, Art. XI.

29. Sur la préservation du texte biblique, depuis les origines jusqu’à nos jours, nous partageons l’avis d’Auguste Lecerf pour qui : " la Providence divine a pourvu à la conservation substantielle du texte sacré, dans la mesure suffisante pour que l'intégralité de la vérité dogmatique parvienne à l'Eglise, en vertu de ce principe de foi que Dieu ne nous manque jamais dans les choses nécessaires. " - Auguste LECERF, op. cit., p. 161. Voir de même la Déclaration de Chicago, article X : " Nous affirmons que l’inspiration, au sens strict, ne vaut que du texte des autographes bibliques, texte que les manuscrits parvenus jusqu’à nous (Dieu y a veillé dans sa providence) permettent d’établir avec une grande exactitude. "

30. Henri BLOCHER, " L’Ecriture et son interprétation, dix thèses ", p. 100.

31. 1ère Déclaration de Chicago, Art. XIII.

32. Auguste LECERF, op. cit., p. 155.

33. Ibid.

34. Ibid., p. 157 et 158. " Le conflit principiel entre la science critique et la foi n’existe pas, pour cette raison que les faits qui font l’objet de la " foi croyance " et qui servent de fondement à la " foi confiance " ne peuvent être ni prouvés ni improuvés par la critique historique. " Sur l’utilité d’une saine critique de la Bible, LECERF affirme : " Toute hypothèse qui ne suppose pas , a priori, la négation de l’inspiration du texte original, l’exclusion systématique du miracle ou de la prophétie, qui ne suppose pas l’idéologie humaniste du XVIIIe et du Xxe siècle ; qui n’implique pas, en un mot, que l’Ecriture soit impropre à remplir la fonction principale que Dieu lui a assignée, a droit à l’examen impartial et attentif de l’exégète réformé. " (p. 166).

35. Ibid., p. 164s. Nous pourrions ajouter que " Les Evangiles ne nous ont pas été donnés pour nous permettre de construire une biographie de Jésus conformément aux exigences de l’érudition moderne, mais afin de le rendre présent à la foi qu’ils veulent faire naître (…) Le point de vue de celui qui cherche Dieu, dans l’Ecriture, n’est pas celui du chronologiste. " 

36. Henri BLOCHER, " Inerrance et Herméneutique ", Dieu parle !, p. 88.

37. Auguste LECERF, op. cit., p. 170 et 171. Voir de même, Greg Bahnsen, "Comment lire la Bible ? Affirmation réformée sur l'interprétation de la Parole de Dieu", La Revue Réformée, N° 184-1995/1, p. 39 : " Aucune croyance erronée ou ignorance historique propres à la société dans laquelle ont vécu les écrivains bibliques, ou leurs erreurs personnelles, ne sont présentées dans l'Ecriture comme des vérités ; aussi n'ont-elles pas à être corrigées par les experts modernes en sciences, en histoire, en sociologie, etc. "

38. Ibid., p. 169.

39. Auguste LECERF, op. cit., p. 166.

40. Cf. G. C. Berkouwer, Holy Scripture, pp. 177ss ; G. W. Bromiley, "Accommodation", in The New International Encyclopedy of the Bible, pp. 24ss.

41. 1ère Déclaration de Chicago, Art. IX.

42. 1ère Déclaration de Chicago, Art. XII. Sur la question des théories scientifiques en opposition évidente avec l’enseignement clair de l’Ecriture, nous partageons l’avis de Paul WELLS selon lequel : " En cas de conflit persistant, la vérité de la Parole, du message clair, a le pas sur l’hypothèse scientifique. " - Dieu a parlé, p. 120.

43. Paul WELLS, Dieu a parlé, pp. 18s.

 


Notice bibliographique

 

Point de vue "évangélique"

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Voir de même, d'un point de vue catholique conservateur :

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Voir de même :

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