Amis
auditeurs bonjours ! Nous sommes heureux de nous retrouver pour cette émission « Croire aujourd’hui », avec au micro le Pasteur Vincent BRU, de l’ERE de Paris, en compagnie de Thomas Constantini. La question à laquelle nous nous proposons de répondre est donc la suivante : « Jésus savait-il qu’il était Dieu ? » Pour ceux qui nous ont écouté samedi dernier, nous nous sommes déjà efforcés de répondre à la question des miracles de Jésus : « Jésus a-t-il vraiment fait des miracles ? » Les récits de miracles dans le Nouveau Testament, sont-ils, oui ou non, à prendre au pied de la lettre, ou bien s’agit-il de simples métaphores, d’une façon de parler sans lien avec la vérité des faits ? A cette question, nous avons répondu que nous n’avions aucune raison de rejeter a priori le miracle, le miracle qui ne peut être pas moins prouvé que récusé. Le refus du miracle, comme nous l’avons vu notamment pour l’écrivain rationaliste français Ernest Renan, dépend en réalité de présupposés philosophiques et religieux plus ou moins inconscients, qui dictent, en quelque sorte, notre lecture de l’Evangile. Une lecture neutre de la Bible, une approche résolument scientifique et objective du Jésus de l’histoire ne nous paraissent pas possible, dans la mesure où nous avons affaire ici à du religieux, c’est-à-dire à une réalité qui a trait au sur-naturel, qui comprend une part de sur-naturel, et qui implique forcément de notre part une démarche de foi. C’est dans la foi que la réalité des miracles de Jésus doit être reçue, et il en est de même pour chaque vérité spirituelle et religieuse dont il est question dans la Parole de Dieu. Ainsi donc, si
c’est effectivement faire fausse route que de concevoir le miracle
sans la foi, ou la foi ne reposant que sur le miracle, la Parole de Dieu
nous invite à recevoir dans la foi la réalité du miracle et sa
signification spirituelle et profonde, le miracle qui, sans en
constituer une preuve à proprement parler, n’en atteste pas moins la
divinité de Jésus-Christ. Et nous
rejoignons ici la question qui nous intéresse aujourd’hui : Jésus
savait-il qu’il était Dieu ? Ou dit
autrement : Jésus, dont les miracles rendent témoignage à sa
divinité, avait-il, oui ou non, conscience de sa divinité, et si oui,
comment ? En fait, la
question qui est ici posée soulève forcément une autre question non
moins importante, celle de la divinité de Jésus-Christ elle-même. Avant même de
pouvoir répondre à la question de la conscience messianique de Jésus,
à la façon dont le Christ pouvait percevoir son identité, il convient
de se pencher tout d’abord sur l’enseignement de la Bible eu égard
à la divinité de Jésus. La question qui
se pose est donc : Jésus était-il Dieu, et le savait-il ? L’enseignement
de la Bible est clair à ce sujet. L’Evangile selon Jean témoigne avec force et évidence de la divinité du Christ, et ce, dès le chapitre un qui commence ainsi : 1 Au commencement était la Parole, et la Parole était avec
Dieu, et la Parole était Dieu. 2 Elle était au commencement avec Dieu. 3 Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a
été fait n'a été fait sans elle. 4 En elle était la vie, et la vie était la lumière des
hommes. Et au verset 14 il est dit, au sujet de cette Parole par qui tout a été créé et qui était au commencement avec Dieu, et qui était Dieu : 14 Et la parole a été
faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité;
et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils
unique venu du Père. Au verset 18 nous lisons de même : 18 Personne n'a jamais vu
Dieu ; Dieu, le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui
qui l'a fait connaître. Un autre texte significatif de l’Evangile selon Jean, c’est : Jean 8:58 Jésus leur dit :
En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu'Abraham fût, je
suis. Remarquez que Jésus ne dit pas : « Avant qu’Abraham fut, j’étais », mais bien « Je suis » ! Jésus reprend à son compte le nom de Dieu, le tétragramme divin révélé à Moïse au moment de l’Exode, sur la montagne du Sinaï. Il affirme ainsi son éternité, sa préexistence, et son égalité avec le Père, avec Dieu. Pour ne mentionner qu’un dernier exemple, mais il y en a beaucoup d’autres, il faut ici mesurer le poids, la portée de la confession de foi de l’apôtre Thomas, à qui le Ressuscité est apparu ainsi qu’aux autres disciples, et qui, après avoir douté un moment, s’est écrié en s’adressant au Christ ressuscité : Jean
20:28 Mon Seigneur et mon
Dieu ! Thomas reconnaît ici explicitement, et sans retenue aucune, la pleine divinité de son Seigneur, attestée par sa résurrection d’entre les morts. « Mon Seigneur et mon Dieu » ! Et remarquez que Jésus ne lui fait aucun reproche. Jésus accepte son adoration, parce qu’il est Dieu, et parce qu’il sait bien que Dieu seul peut être l’objet de notre adoration. Ainsi donc, nous voyons que l’Evangile de Jean atteste sans aucune ambiguïté, la pleine divinité de Jésus-Christ, le Fils éternel de Dieu, qui s’est incarné dans le sein de la vierge Marie, pour nous sauver. Le but de cet Evangile est d’ailleurs précisément de conduire ses lecteurs à la foi en la divinité de Jésus. Jn 20.30 Jésus a fait encore, en présence de ses disciples, beaucoup d'autres miracles, qui ne sont pas écrits dans ce livre. 31 Mais ces choses ont été écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie en son nom. Mais nous
pourrions en dire autant des Epîtres de l’apôtre Paul
(voir Ph 2.6-11 ; 1 Co 15.51 ; 2 Co 8.9 ; Ga 4.4 ;
Rm 8.3, 32) qui, comme l’a reconnu l’exégète critique allemand
Rudolf Bultmann lui-même, affirme la préexistence et la divinité
du Christ : « La doctrine
selon laquelle Jésus-Christ est le Fils de Dieu préexistant devenu
homme (…) est considérée par Paul comme certaine, et l’hymne de
Philippiens 2.6-11 antérieure à Paul prouve qu’il n’est pas le
premier à l’avoir introduite dans la pensée chrétienne. »[1]
Nous verrons
tout à l’heure comment la croyance de la communauté chrétienne
primitive en la préexistence et en la divinité de Jésus trouve précisément
son origine dans l’enseignement de Jésus lui-même et dans la
conscience que celui-ci avait de sa divinité. Mais avant
cela, et après une pause musicale, c’est Thomas Constantini,
doctorant en Histoire à la Sorbonne, et membre de l’ERE de Paris, qui
va nous parler de la façon dont la divinité de Jésus a été reçue
dans l’histoire de l’Eglise jusqu’à aujourd’hui. II (…) Merci Thomas
pour ces éclaircissements très instructifs ! Nous nous
retrouvons pour la suite de cette émission après une pause musicale. III Alors Jésus
savait-il qu’il était Dieu ? Le témoignage
du Nouveau Testament, nous l’avons vu tout à l’heure, ainsi que le
témoignage de l’histoire de l’Eglise et des grandes formulations
trinitaires des premiers Conciles œcuméniques attestent avec force la
pleine divinité de Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, de même
substance que le Père et que le Saint-Esprit. Mais alors,
n’est-il pas étonnant de constater, notamment dans les Evangiles
synoptiques, la discrétion de Jésus concernant son identité véritable,
concernant sa divinité ? Autant l’Evangile
de Jean et les Epîtres pauliniennes sont claires à ce sujet, autant
les Evangiles synoptiques sont relativement discrets, ou du moins pas
aussi explicites que ces derniers concernant la divinité de Jésus. Comment
expliquer ce phénomène ? Doit-on considérer
–comme d’aucuns l’ont prétendu – que la doctrine de la divinité
de Jésus telle qu’elle est clairement affirmée dans le quatrième
Evangile, l’Evangile selon Jean, ou dans les Epîtres de Paul, est en
réalité une création de la communauté primitive, dans
laquelle Jésus lui-même ne se serait pas reconnue ? Ou bien faut-il
penser que si Jésus, durant sa vie terrestre, avait eu entre les main
l’Evangile selon Jean, il aurait bel et bien affirmé : « c’est
bien moi ! » ? Et si l’on
admet, comme le Nouveau Testament nous y invite, que Jésus savait bel
et bien qu’il était Dieu, de part le lien privilégier qu’il avait
avec le Père, avec Dieu, et parce que même dans son humanité Jésus
n’a jamais cessé pour autant d’être pleinement Dieu, et donc
devait nécessairement connaître son identité véritable, d’une manière
ou d’une autre, comment se fait-il alors qu’il l’ait, cette
identité, en quelque sorte cachée, durant son ministère terrestre, et
l’a-t-il vraiment cachée ? Telles sont les
questions auxquelles ils nous faut répondre. Concernant la
connaissance que Jésus avait de lui-même, de son identité, nous
voyons que déjà à 12 ans Jésus connaissait parfaitement son lien
privilégier avec Dieu. En Luc 2.49 il
dit à Joseph et Marie, tandis qu’il se trouvait dans le temple de Jérusalem
avec les Docteurs de la Loi : « Ne savez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires de mon Père ? » Nous constatons
de même que, par la suite, Jésus, sans véritablement cacher son
identité, laisse néanmoins planer un certain mystère autour de
celle-ci, en particulier vis-à-vis de la foule qui le suivait. Aux disciples,
au groupe des Douze, l’enseignement de Jésus se fait néanmoins plus
explicite, ceux-ci étant mieux à mène de recevoir un tel
enseignement. En Matthieu
16 il les interroge, sans pour autant
leur apporter une réponse ferme et définitive sur son identité : « Aux dires des gens, qui dit-on que je
suis ? » (Mt 16.13) A cela les
disciples répondent : 4 Les
uns disent que tu es Jean-Baptiste ; les autres, Elie ; les autres, Jérémie,
ou l'un des prophètes. Alors Jésus leur dit : 15 Et vous, qui dites-vous que je suis? 16 Simon
Pierre répondit : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Notons néanmoins,
malgré cette belle confession de foi de l’apôtre Pierre, que ce
n’est vraiment qu’après sa résurrection d’entre les morts que
les disciples comprendront toute la portée de l’enseignement de Jésus
sur sa personne, et qu’ils confesseront dès lors, sans la moindre hésitation,
la pleine divinité de leur Seigneur. Pour expliquer
ce phénomène de ce que les théologiens ont appelé le « mystère
messianique », concernant le dévoilement
progressif de l’identité de Jésus
et de sa divinité, un livre tout à fait passionnant paru il y a
quelques années aux éditions du Cerf, par le dominicain François
Dreyfus, intitulé justement : « Jésus savait-il
qu’il était Dieu ? » apporte des éclairages très intéressants
dont je voudrais vous faire part maintenant. Je cite,
c’est à la page 128 –c’est la conclusion du livre : « Au
cours de l’enquête, une quasi-certitude s’est faite jour : la
doctrine de la divinité de Jésus était certainement déjà établie
dans les communautés chrétiennes vers l’an 50. Sa naissance est
donc, évidemment, antérieure de quelques années. Or c’est une époque
où l’évangélisation du monde païen venait juste de commencer, tout
l’élément actif et dynamique venait du judaïsme. Il y avait dans le
judaïsme à cette époque une horreur viscérale pour tout ce qui
rappelait la divinisation des grands hommes, si fréquente dans le
paganisme détesté. Cette horreur devait empêcher absolument la création
de la doctrine affirmant le caractère divin de Jésus. Un tel obstacle
ne pouvait être surmonté que par une certitude incontestable. Seul un
enseignement explicite de Jésus, confirmé par le miracle de Pâque,
remplissait cette condition. » (p. 128) Et un peu plus
loin il dit ceci : « Si
l’on admet, ne serait-ce que comme hypothèse de travail, que Jésus
de Nazareth était bien celui que nous présente saint Jean : le
Verbe qui est Dieu et qui s’est incarné pour sauver les hommes ;
si l’on admet, toujours dans le cadre de la même hypothèse de
travail, que Jésus avait pleinement conscience et de ce mystère et de
sa mission de le faire connaître aux hommes, alors il paraîtra évident
que ce mystère ne pouvait pas être révélé d’emblée à des hommes
formés par une mentalité si peu accordée à une telle doctrine. Il a
fallu une longue maturation, une pédagogie attentive à présenter à
chaque étape ce qui pouvait être assimilé par un auditoire assez peu
réceptif, en réservant à un cercle plus intime [en l’occurrence
Pierre, Jacques et Jean] des révélations plus explicites. Et ces révélations
elles-mêmes n’ont pu être diffusées au-delà de ce groupe qu’au
moment où les évènements de Pâques et l’Esprit de la Pentecôte
auraient rendu les disciples plus accueillants à ce qu’au début ils
auraient repoussé avec horreur. » (p. 129) Et il conclu en
disant –et nous faisons tout à fait nôtres cette conclusion –
: « En
bref, nous avons voulu montrer que, du point de vue d’une exégèse
historique critique exigeante et loyale, on n’a aucune raison de
refuser ou de mettre en doute la figure du Jésus de l’histoire que
nous présentent le quatrième évangile, les Pères de l’Eglise, les
Conciles œcuméniques et le témoignage unanime de près de vingt siècles
de tradition chrétienne. Si Jésus, au cours de sa vie terrestre, avait
eu entre les mains le quatrième évangile, il aurait dit : c’est
bien moi. » (p. 129) Ainsi donc,
amis auditeurs, à la question : « Jésus savait-il qu’il
était Dieu ? », vous l’aurez compris, notre réponse, dans
la foi, est positive. Oui ! Jésus
savait bel et bien qu’il était Dieu, et il l’a dévoilé
progressivement à ses disciples afin qu’ils n’en aient aucune
doute, jusqu’à l’affirmation pleine de confiance et d’assurance
de l’apôtre Thomas : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » C’est parce
que Jésus était Dieu qu’il connaissait son identité, et c’est
aussi parce qu’il est véritablement Dieu qu’il est, et qu’il veut
être notre Sauveur et notre Seigneur, lui dont l’apôtre Paul nous
dit que : 9 Dieu l'a souverainement élevé, et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, 10 afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, 11 et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père. A vous
maintenant, amis auditeurs, d’y ajouter foi, et de reconnaître dans
la personne de Jésus-Christ l’unique Sauveur dont dépend, en définitive,
toute notre paix et toute notre joie, et le salut de l’humanité. La Parole de
Dieu le dit bien : Actes 4:12 Il n'y a de salut en aucun autre ; car il n'y a sous le ciel aucun autre nom qui ait été donné parmi les hommes, par lequel nous devions être sauvés. C’est parce
qu’il est Dieu que Jésus-Christ est unique, dans toute l’histoire
de l’humanité. C’est parce
qu’il est Dieu qu’il est véritablement « le seul Médiateur
entre Dieu et les hommes » (1 Tm 2.5) et qu’il importe, par conséquent,
aux hommes de toutes les nations de se tourner vers lui pour recevoir le
Salut d’en haut ! Alors, pourquoi
pas vous ? [1] R. Bultmann, Theology of the New Testament, 4e éd., 1965, tome I, p. 131 – cite dans François Dreyfus, Jésus savait-il qu’il était Dieu ?, Cerf, 1984, p. 60.
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