Prédication de Baptême ERE de Paris Dimanche 19 Septembre 1999 Pasteur Vincent BRU
Textes : Gn 17.1-14 LAlliance avec Abraham ; la circoncision Col 2.11-13 " Ensevelis avec lui par le baptême " Ac 2.38 " Car la promesse et pour vous, et pour vos enfants " Mc 10.13-16 " Laissez venir à moi les petits enfants "
Chers frères et surs en Christ, chers amis, cest avec joie et avec reconnaissance que nous allons célébrer tout à lheure le Baptême de Julien, fils de nos amis Lionel et Jasmine DEJOUX. Et à cette occasion, jai pensé quil serait bon pour nous tous de nous rappeler le sens, la signification profonde du baptême chrétien, selon la Parole de Dieu. Que signifie exactement cette cérémonie, cette célébration du baptême, et que se cache-t-il derrière ce symbole, derrière ce rituel, ces quelques gouttes deau versées sur la tête du baptisé. La question est dautant plus importante pour nous que, sans doute, la plupart dentre nous ici présents, avons déjà été baptisés. Certains ont été baptisés étant enfants, dautres, peut-être, à la suite de leur conversion, alors quils étaient adultes. Il sen trouve sans doute parmi vous qui ont été baptisés dans lEglise catholique, tandis quun bon nombre lont été dans une Eglise Réformée, ou bien dans une Eglise Baptiste. Certains ont été baptisés par immersions, dautres par aspersion, comme cest la coutume dans notre Eglise. Vous comprendrez aisément que selon la Bible, lessentiel nest pas tant la modalité du baptême que son contenu même. Peu importe le fait davoir été baptisé par aspersion, ou par immersion, ou que sais-je encore, pourvu que lon ait saisi vraiment le sens, la véritable portée du baptême chrétien, selon la Parole de Dieu. Limportant, chers amis, cest que nous soyons véritablement convaincus de la nécessité et de limportance du Baptême pour la vie de lEglise, et pour notre vie de chrétien. Car enfin, Jésus-Christ a dit à ses Apôtres : " Allez, faites de toutes les nations des disciples. Baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit " ! Le baptême a été institué dans lEglise non pas par des hommes, mais par Jésus-Christ lui-même, mais par Dieu. Le baptême est une institution divine, et cest pourquoi notre sujet est dune importance primordiale, car il sagit là de notre salut, ni plus ni moins. Le baptême a trait à notre salut, il en est la figure même, et le vivant symbole.
Je vous propose donc ce matin de nous poser les trois questions suivantes, au sujet du baptême :
I Première question donc : quel est le fondement du baptême ? La question est légitime. Avant de sinterroger sur le contenu du baptême, sur la réalité signifié par celui-ci, encore faut-il sentendre sur ce qui constitue sa raison dêtre, sur la réalité sur laquelle il repose. Avant de " sattaquer " aux murs, ils convient de se pencher sur les fondements sans lesquels ces mêmes murs nexisteraient pas. Pour prendre une autre image, dans une toile de maître, une peinture, larrière-fond est aussi important que les personnages placés au premier plan, car sans celui-ci, ces derniers perdraient tout leur éclat et toute leur luminosité. Placer sur un bel écrin, même le plus modeste des diamants brille de mille feux, tandis quà létat naturel, la pierre la plus précieuse apparaît bien pâle. Ainsi en est-il du baptême : le fondement du baptême, ce qui est situé en arrière-plan du baptême, si vous voulez, et qui lui donne tout son sens et tout son éclat, cest ce la Bible désigne par le mot " alliance ", et qui nest autre que la relation que Dieu, dans son amour, a bien voulu établir avec son peuple, avec nous. En effet, tout commence, dans la Bible, avec lalliance, lalliance éternelle de Dieu, cette alliance quil a établie dès le commencement, dès la création du monde, avec Adam, avec lhomme, et quil na jamais eu de cesse de renouveler ensuite avec sa descendance, de génération en génération, et ce, malgré la révolte et linfidélité de lhomme. Notez bien quil sagit là dune alliance de grâce, cest-à-dire une alliance que lhomme, de par sa nature pécheresse, ne mérite pas, une alliance qui sappuie sur la seule bonté de Dieu, sur son amour et sur sa compassion envers nous. Cela apparaît nettement dans le texte qui nous a été lu tout à lheure, dans le livre de la Genèse, au chapitre 17, et où il est question de lalliance de Dieu avec Abraham. Dieu conclu une alliance avec Abraham, alliance par laquelle Il entend tout mettre en uvre pour sauver lhumanité pécheresse. Par cette Alliance, Dieu fait à Abraham une triple promesse. Au verset 4 il lui promet une grande descendance : il sera le père dune foule de nations. Au verset 8 il lui promet un pays, le pays de Canaan, la Terre promise où coule le lait et le miel. Et enfin, au chapitre 12 et au verset 3, Dieu dit à Abraham : " Toutes les familles de la terre seront bénies en toi ". A travers Abraham et sa descendance, ce sont " toutes les familles de la terre " qui sont visées par lalliance de Dieu, par le dessein de salut de Dieu pour le monde. La finalité de lalliance nest autre que la bénédiction universelle de toutes les familles de la terre, le fait que le salut de Dieu, par-delà lélection du seul peuple dIsraël, sétende à toute lhumanité, à tous les hommes, pour autant que ceux-ci reçoivent cette bénédiction dans lobéissance de la foi. Ainsi, par son alliance, Dieu sengage solennellement envers Abraham et envers sa descendance. Je lis au verset 7 : " Jétablirai mon alliance avec toi et ta descendance après toi, dans toutes leurs générations : ce sera une alliance perpétuelle, en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de tes descendants après toi. " A toutes les époques de lhistoire du salut, les croyants se réfèreront à cette alliance de grâce, et à ses promesses, alliance dont lécho retentit dans toutes les pages de lEcriture, et qui trouve son plein accomplissement en Christ, mort et ressuscité pour nous, et pour notre salut. De cette Alliance, Abraham et sa descendance en porteront la marque dans leur chair, selon le commandement du Seigneur : Je lis au verset 10 : 10 Voici comment vous garderez l'alliance que je traite avec vous et avec ta descendance après toi: tout mâle parmi vous sera circoncis. 11 Vous vous circoncirez comme signe d'alliance entre vous et moi. 12 A l'âge de huit jours, tout mâle parmi vous sera circoncis, dans (toutes) vos générations, qu'il soit né dans la maison ou qu'il soit acquis à prix d'argent de la part d'un étranger qui n'est pas de ta descendance. 13 On devra circoncire celui qui est né dans ta maison et celui qui est acquis avec ton argent; ce sera dans votre chair (la marque d') une alliance perpétuelle. 14 Un mâle incirconcis, qui n'aura pas subi la circoncision dans sa chair, sera retranché du milieu de son peuple: il aura rompu mon alliance. La circoncision, je ne vous lapprends pas, consistait à couper un bout du prépuce de tout enfant mâle, objet de la promesse, ainsi quà tous ceux qui faisaient mine de vouloir se joindre au peuple de Dieu. Cétait, au même titre que le repas pascal, avec limmolation des agneaux, un sacrifice sanglant, qui signifiait que les israélites, du fait de leur élection par Dieu, étaient distingués, coupés du reste du monde, signifiant ainsi leur appartenance au Seigneur, le fait quils étaient mis à part pour Dieu, pour une mission spéciale. La circoncision comprenez bien cela ne signifiait rien dautre en réalité que lentrée dans le peuple de Dieu, le fait que les israélites étaient mis à part par Dieu comme membres du peuple de lAlliance, le peuple de la promesse, le peuple à qui Dieu parle et par lequel Dieu parle aux hommes. Vous voyez bien, frères et surs, que ce qui constituait le fondement de la circoncision, comme sacrement de lancienne Alliance, nétait autre précisément que cette Alliance de grâce, conclue originellement avec Adam, et renouvelée ensuite avec Abraham et avec sa postérité. La circoncision était, dans la chair des hébreux, à la fois le signe et le sceau de lAlliance de grâce, et cest à ce titre que le baptême chrétien, sacrement de la nouvelle disposition de lAlliance, trouve de même son fondement et sa raison dêtre dans cette seule et même alliance que le Christ a pleinement réalisée par sa vie et par sa mort. Nous touchons là, frères et surs, au cur de la théologie biblique du baptême, et donc aussi du salut, de la rédemption. LAlliance constitue le fondement du baptême, qui, comme nous lapprend le NT, a pris, avec la venue de Jésus-Christ et la naissance du nouveau peuple de Dieu quest lEglise, la place de la circoncision. Tout comme la circoncision pour le peuple juif, le baptême nest autre que le signe et le sceau de lAlliance éternelle, le signe et le sceau du salut de Dieu et de son élection, le signe visible de la grâce invisible de Dieu, qui nous sauve par Jésus-Christ. Ainsi, celui qui reçoit le baptême, signifie de la sorte son appartenance au peuple de Dieu, son appartenance à lEglise, le peuple de lAlliance, le peuple élu, le peuple avec qui Dieu a fait alliance. Le baptisé est ainsi distingué des autres hommes, non pas, certes, en vertu de ses propres mérites, mais en vertu de la grâce souveraine de Dieu, qui la appelé gratuitement, et sans considération de ses uvres, au salut, de sorte quil est devenu " enfant de Dieu ", " membre de la famille de Dieu ", selon lexpression de lApôtre Paul. Voilà pourquoi lon peut dire, en un certain sens, que cest Dieu qui baptise : cest Dieu lui-même qui promet à celui qui se fait baptisé, ou qui est présenté au baptême, quil ne labandonnera pas, et quil mettra tout en uvre pour conduire celui-ci dans la voie du salut, et quil ly maintenir. Vous voyez, laccent est placé strictement sur linitiative de Dieu, et sur son Alliance, qui nous précède, et qui constitue véritablement le fondement même du baptême, comme cétait aussi autrefois le cas pour la circoncision.
II Et cela nous conduit à notre deuxième question : quel est le sens, quel est le contenu du baptême ? Quest-ce que celui-ci signifie-t-il vraiment ? Le fondement du baptême, avons-nous dit, ce qui donne à celui-ci à la fois son sens et sa raison dêtre, cest lAlliance, cest la relation que Dieu a bien voulu établir, dans sa grâce, non pas certes avec tous les hommes, mais avec son peuple, avec lEglise, lhumanité croyante. Mais que signifie exactement le baptême ? Quelle réalité le baptême représente-t-il à nos yeux ? LApôtre Paul, dans son Epître aux Colossiens, répond à cette question : 12 Ensevelis avec lui par le baptême, vous êtes aussi ressuscités en lui et avec lui, par la foi en la puissance de Dieu qui l'a ressuscité d'entre les morts. Dans sa majestueuse Epître aux Romains, lApôtre lève encore plus le voile sur ce grand mystère signifié par le baptême : Je lis au chapitre 6 et au verset 3 : 3 Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Christ-Jésus, c'est en sa mort que nous avons été baptisés? 4 Nous avons donc été ensevelis avec lui dans la mort par le baptême, afin que, comme Christ est ressuscité d'entre les morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie. Jésus-Christ, mort et ressuscité pour nous : voilà, frères et surs, la réalité signifiée par le baptême. Leau du baptême représente à nos yeux la bénédiction du salut de Dieu en Christ, le Sauveur. Plus exactement, le baptême nous place sous la promesse de Dieu, la promesse de lAlliance, la promesse du salut, de la réconciliation avec Dieu, du pardon des péchés et de la vie éternelle pour quiconque croit. Il signifie, au même titre que la circoncision dans lAT, lentrée du fidèle dans le peuple de Dieu, dans lEglise, le fait que nous soyons mis au bénéfice des bienfaits spirituels accordés par Dieu dans le cadre de lAlliance. Recevoir le baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, cest se placer sous la bénédiction divine, cest reconnaître que le salut ne se trouve quen lui seul, quil est lui seul lAuteur de notre salut, et que nous dépendons entièrement de lui, dans la vie comme dans la mort. Il convient cependant ici déviter une méprise : il va de soit, selon la Bible, que le fait davoir été baptisé ne fait pas forcément de nous des chrétiens ! Le baptême en lui-même ne sauve pas, ce nest pas quelque chose de magique qui agit tout seul, quelle que soit lattitude de cur de celui qui le reçoit, ou qui la reçu. Comme la si bien dit un Père de lEglise : on ne naît pas chrétien, on doit le devenir ! Le baptême est le signe de lamour de Dieu et de son Alliance, certes, mais cela ne me dispense pas de croire, ni de mengager activement pour la cause de lEvangile, comme un vivant témoin de Jésus-Christ. Quel que soit mon passé, quel que soit mon vécu au sein de lEglise, le jour vient où je dois pour moi-même confirmer lAlliance dans laquelle jai été placé de par mon baptême, et où je dois véritablement me convertir à Jésus-Christ, en recevant celui-ci comme mon unique Seigneur et Sauveur. Il y a là, frères et surs, une vérité, à laquelle il importe de prêter toute notre attention, au moment où beaucoup, parmi nos contemporains, se réfugient derrière un semblant de religiosité, une vague appartenance à lEglise. Je suis chrétien, entendons-nous dire souvent, car jai été baptisé. Mais cher ami, ai-je alors envie de dire, quas-tu donc fait de ton baptême ? Où donc se trouve la réalité signifiée par celui-ci dans ta vie ? Et où donc est ta foi ? En quel Dieu crois-tu ? Où as-tu donc placé ta confiance ? Et quelle place Jésus-Christ occupe-t-il vraiment dans ton cur et dans ta vie ? Osons donc, osez, vous posez ces questions ce matin, car nous ne pouvons pas, devant Dieu, nous réfugier derrière le simple fait davoir été, un jour, simplement, baptisé, car Dieu regarde au cur ! Non pas à lapparence, non pas à ce qui frappe les yeux, mais au cur, à notre intériorité même. Le fait davoir été baptisé nous rends en réalité dautant plus responsables devant Dieu, pour ne pas dire redevables, car nous navons alors, aux yeux de Dieu, aucune excuse à notre incrédulité, à notre impiété. Il y a quelque temps, le pape interpellait ainsi notre pays, la France, et par-delà la France le monde occidental en voie de déchristianisation : " France, quas-tu fait de ton baptême ? " Il avait raison ! Je ne dis pas cela parce que cest le pape, mais parce que son interpellation savère ici tout à fait bibliquement justifiée. " France, quas-tu fait de ton baptême " ? Quas-tu fait de ton héritage chrétien, de ton glorieux passé, de ton appartenance au Christ ? Quas-tu fait de tes martyrs pour la foi, de la Réformation, du combat de lEglise pour le salut du monde, de notre humanité souffrante ? Je suis tous les jours interpellé, en tant que chrétien, par limpiété et lirréligiosité de notre temps. Il ny a, sans doute, aucun précédant à cela. Notre époque est marquée par lIncrédulité. La foi chrétienne historique ne fait plus recette. Nous le savons bien ! Et pourtant, nous voulons croire en la victoire du Christ, et nous nous réjouissons, au milieu même des tribulations, et de lindifférence du plus grand nombre, dans lespérance du Royaume qui vient, et dont le baptême de Julien signifie encore aujourdhui à nos yeux linaltérable beauté et vérité.
III Cela étant dit, il importe de nous poser encore la question suivante : A qui le baptême doit-il être administré, selon la Parole de Dieu ? Ce qui revient à dire : A qui la promesse signifiée par le Baptême sadresse-t-elle ? A cela le Livre des Actes répond, sans la moindre équivoque : Ac 2.39 Car la promesse est pour vous, pour vos enfants, et pour tous ceux qui sont au loin, en aussi grand nombre que le Seigneur notre Dieu les appellera. Dans lEvangile selon Marc que nous avons lu, Jésus dit de même à ses disciples : Mc 10.14 Laissez venir à moi les petits enfants, et ne les en empêchez pas; car le royaume de Dieu est pour ceux qui leur ressemblent. Il apparaît donc clairement que la promesse de lAlliance, la promesse du salut de Dieu ne sadresse pas seulement aux adultes, mais encore aux enfants, qui sont de ce fait aussi héritiers du Royaume, au même titre que leurs parents. Les enfants des parents croyants sont, au même titre que les enfants juifs dans lAT, mis à part par Dieu, en vertu du lien privilégié qui existe entre les parents et leurs enfants, dans le cadre de lAlliance. Selon les propres mots de lApôtre Paul dans sa première Epître aux Corinthiens : les enfants des parents croyants sont " saints ", et cest pourquoi ils doivent porter sur eux la marque de leur appartenance à lEglise, au peuple de Dieu, cest-à-dire le baptême. A ce titre, il convient de se rappeler ici que le fait de faire baptiser son enfant engage tout à la fois la responsabilité de Dieu et celle des parents, comme aussi celle de toute lEglise. Dieu sengage en effet à mettre tout en uvre pour emmener à lobéissance de la foi vos enfants qui ont été placés sous la garde de lEglise. Certainement, le jour viendra où votre enfant devra, pour lui-même, saisir par la foi les promesses de lEvangile, et ratifier pour lui-même lAlliance que Dieu a conclue avec lui le jour de son baptême. Mais la possibilité lui sera aussi laissée de rompre lAlliance, en se coupant lui-même de la communion de lEglise. Auquel cas, et comme le dit notre Liturgie, sa place resterait néanmoins marquée pour toujours dans lEglise. Votre responsabilité à vous, parents, cest déduquer chrétiennement vos enfants, de les élever dans la foi chrétienne, de faire tout votre possible pour faciliter leur intégration dans lEglise, et ce, dès leur plus jeune âge. Cest une lourde responsabilité, certes, mais quelle récompense lorsque lon voit ses enfants prendre fait et cause pour lEvangile, et transmettre à leur tour à leurs enfants le flambeau de la foi ! Alors que puis-je faire de mieux pour terminer, sinon de vous encourager chacune et chacun et de vous exhorter à vous souvenir de votre baptême, en faisant, comme tout à nouveau, vôtres les promesses qui sont attachées à celui-ci, promesses de bénédiction et de salut pour quiconque croit. Saisissez la vie éternelle qui vous est offerte en Christ ! Emparez-vous des promesses de lEvangile, et devenez, ou redevenez les vivants témoins du Christ vainqueur. Il ny a pas, croyez-le bien, de plus grande et de plus belle vocation, et il ny a rien de plus important au monde. Dieu vous invite à son Alliance. A lui la gloire, dans lEglise, et en Jésus-Christ. Amen ! |