Prédication sur Ephésiens 1.1-2

 ERE de Paris

Dimanche 2 octobre 1999

Pasteur Vincent BRU

Ps 2 ; Ap 21.1-5

 

Chers frères et sœurs en Christ, je vous propose donc ce matin de nous pencher sur les deux premiers versets de l’Epître de Paul aux Ephésiens, et de commencer ainsi notre série de prédications sur cette Epître.

L’Epître aux Ephésiens constitue, sans aucun doute, l’un des livres de la Bible qui nous éclaire le plus sur le dessein de salut de Dieu pour le monde, et sur le mystère de l’Eglise, la nouvelle humanité, la communauté de tous ceux qui sont unis à Christ par la foi.

A ce titre, cette Epître a quelque chose à nous dire, à nous chrétiens de l’ERE de Paris, à l’aube du troisième millénaire.

Cette Epître a quelque chose à nous dire en nous rappelant la véritable portée de l’Evangile ainsi que ses implications pratiques pour notre vie.

En fait, il s’agit là, ni plus ni moins, que d’un magnifique abrégé de l’Evangile, la synthèse de la pensée de l’Apôtre Paul au sujet de l’Evangile, tandis qu’il est à l’apogée de son ministère.

D’aucun ont considéré cette Epître comme « la reine des Epîtres ».

C’était du reste l’Epître préférée de Calvin, avec aussi l’Epître de Paul aux Romains.

Alors je pense que ces quelques considérations devraient suffire pour nous mettre déjà « l’eau à la bouche », et pour nous motiver vraiment dans notre étude de cette Epître, afin que nous puissions en retirer toute la richesse et toute la profondeur.

 

1. But et circonstances de l’Epître

Quelques mots, tout d’abord, en guise d’introduction, sur le contexte et les circonstances de cette Epître.

Il semble bien, de l’avis de la majorité des commentateurs, que l’Apôtre Paul a rédigé cette lettre alors qu’il était en prison, à Rome, au environ de l’été 62, soit environ quatre ans avant sa mort.

Les Epîtres de Colossiens et de Philémon ont aussi été écrites à ce moment-là.

L’Apôtre est donc à la fin de son ministère, et son premier objectif, dans cette Epître est de livrer à ses destinataires une synthèse de sa pensée, un enseignement solide sur les fondements de la foi et de la vie chrétienne.

L’Apôtre entend laisser à ses destinataires un condensé de l’essentiel à croire et à vivre.

Cela apparaît dès le début de l’Epître que nous avons lu : versets 1 et 2.

1  Paul, apôtre du Christ-Jésus, par la volonté de Dieu, aux saints et fidèles en Christ-Jésus qui sont à Éphèse:

2  Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ.

D’emblée, l’Apôtre place les destinataires de sa lettre devant la réalité de la grâce et de la paix que le Christ leur a acquise.

Le but de l’Epître est ainsi clairement identifié.

Mais voyons donc cela point par point.

 

2. Le destinateur : « Paul, apôtre de Jésus-Christ, par la volonté de Dieu »

Dans ces deux premiers versets, il est question tout d’abord de Paul, l’auteur de notre Epître.

« Paul, apôtre de Jésus-Christ, par la volonté de Dieu ».

Remarquez que c’est en tant qu’Apôtre que Paul entend se présenter à ses destinataires.

Ailleurs dans ses Epîtres, Paul se présente tantôt comme le « serviteur » ou le « prisonnier » de Jésus-Christ, comme en romain 1 par exemple.

Mais le plus souvent, c’est dans sa qualité d’ « apôtre » qu’il entend faire valoir son autorité et la vocation spécifique que le Seigneur lui a confiée, en tant qu’apôtre des païens.

Paul est « apôtre » du Christ, c’est-à-dire son envoyé (shâlîah), ou plus précisément son délégué, son porte-parole.

Selon l’usage rabbinique, l’apôtre est pour celui qui l’envoie « un autre lui-même ».

Autant dire, donc, que l’apôtre Paul est, pour le Christ, un autre lui-même : il le représente, si vous voulez, devant ceux auxquels il s’adresse.

Paul est le « représentant » du Christ sur la terre ; il est son ambassadeur.

C’est dire toute l’autorité dont les apôtres du Christ, et donc aussi l’apôtre Paul étaient revêtue.

« Qui vous écoute m’écoute » (Lc 10.16), dit Jésus à ses apôtres, revêtus de la puissance du Saint-Esprit.

C’est donc revêtu de l’autorité de Jésus-Christ lui-même que Paul entend s’adresser à ses destinataires, et pour appuyer cette autorité qu’il tient de Dieu, il ajoute : « Paul, apôtre de Jésus-Christ, par la volonté de Dieu ».

Paul attribue sa vocation, son ministère, son apostolat à une initiative de Dieu.

Ce n’est pas lui qui a décidé un jour d’être « apôtre de Jésus-Christ », mais c’est le Seigneur Dieu lui-même qui après l’avoir appelé à la conversion, sur le chemin de Damas, a fait de lui son « envoyé », son « apôtre ».

Il s’ensuit donc que l’enseignement de Paul doit être considéré et reçu comme la Parole de Dieu même, au même titre que les écrits prophétiques de l’AT, et que l’Ecriture sainte tout entière.

La lettre de l’apôtre Paul aux Ephésiens, comme aussi du reste tout le NT, ne constitue rien de moins que la Lettre du Christ à son Eglise, le Traité d’Alliance entre le Seigneur-Sauveur, Jésus-Christ, et son Eglise, objet de son élection.

 

2. Les destinataires : « aux saints et fidèles en Christ-Jésus qui sont à Éphèse »

Dans la seconde partie du verset, Paul se sert de plusieurs épithètes pour décrire ses lecteurs : « aux saints et fidèles en Christ-Jésus qui sont à Éphèse »

Tout d’abord, il y a le mot « saints », agios en grec.

L’apôtre Paul utilise couramment ce terme pour désigner tous ceux qui appartiennent à Jésus-Christ, ceux que Dieu a mis à part – c’est là le sens du mot « saint ».

C’est ainsi que tous les chrétiens sont « saints » par vocation.

Tous ceux qui appartiennent à Jésus-Christ, c’est-à-dire tous ceux qui ont, par la grâce de Dieu, placé leur confiance en Christ, sont « saints » : ils sont membres du peuple de Dieu, unis à Christ par la foi, pour le service.

Mais les chrétiens ne sont pas seulement « saints », ils sont aussi « fidèles » : « aux saints et fidèles en Christ-Jésus ».

Le mot « fidèle » (pistos en grec), désigne, dans la Bible, d’abord Dieu, dont la fidélité est vraiment sans faille, et ensuite seulement les croyants.

Les « croyants » sont fidèles dans le double sens de « celui qui a la foi », « celui qui croit », et de « celui qui est fidèle, qui est fiable », « celui sur lequel on peut compter vraiment ».

Mais la pointe de notre verset n’est pas là.

Certes, les croyants sont « saints » et « fidèles », mais c’est seulement « en Christ » qu’ils le sont !

« Aux saints et fidèles en Christ-Jésus » !

Il y a là, frères et sœurs, dans ce « en Christ » toute la clé de notre Epître.

Nous verrons plus loin comment l’apôtre magnifie l’union vitale du croyant « en Christ », cette expression qui apparaît 120 fois dans l’Epître.

Etre « en Christ », c’est être unis à Jésus-Christ d’une façon personnelle et vitale, comme les membres au corps (Rm 12.4ss ; 1 Co 6.15 ; 12.12ss ; , ou comme les sarments au cep (Jn 15).

Selon le NT, être chrétien, c’est être « en Christ », c’est-à-dire uni à lui et à son peuple.

En étant unis « en Christ », les chrétiens sont, de ce fait, unis les uns aux autres : ils sont membres de la même famille (1.5 ; 2.19 ; 4.6 ; 5.1) ; ils constituent ensemble une nouvelle humanité (2.11-12, 15-16) ; ils sont le corps du Christ sur la terre (Ep 1.23 ; 2.16 ; 3.6 ; 4.4, 12, 16 ; 5.30).

Enfin, l’apôtre termine la description de ses lecteurs en ajoutant « à Ephèse » : « aux saints et fidèles en Christ-Jésus qui sont à Éphèse »

Ephèse était une ville portuaire à l’activité et au commerce florissants.

C’était la capitale de la province romaine d’Asie.

C’était aussi le siège du culte de la déesse Diane ou Artémis, dont le temple était considéré à l’époque comme la septième merveille du monde.

L’Apôtre Paul avait séjourné longuement dans cette ville, où il avait créé tout un réseau d’églises de maisons, qui s’était étendu à différentes villes d’Asie (Voir Ac 18, 19-21 ; 19-20).

Il semble bien, donc, que Paul a écrit cette Epître afin qu’elle circule dans ces différentes villes d’Asie, ce qui expliquerait d’ailleurs l’absence des mots « à Ephèse » dans certains manuscrits (comme le Vaticanus et le Sinaïticus).

Quoi qu’il en soit, l’identité des destinataires de notre Epître est ainsi clairement définie : ils sont « saints », parce qu’ils appartiennent à Dieu ; ils sont « fidèles », puisqu’ils ont foi en Christ ; et par-dessus tout, ils sont « en Christ », et c’est pourquoi ils sont à la fois « saints » et « fidèles ».

 

4. Le contenu de l’Epître : « Grâce et paix »

Le verset 2 nous livre avec davantage de précision le message que l’Apôtre Paul entend délivrer à ses lecteurs : « Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ. »

Dans sa lettre, Paul met en lumière ce que Dieu a fait pour nous et pour notre salut, et ce, afin de construire l’humanité nouvelle, la communauté de tous ceux qui sont unis en Christ par la foi.

En un sens, on peut dire que tout le contenu de l’Epître est déjà contenu là, dans cette salutation apostolique : « Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ. »

La « grâce » renvoie à l’initiative salvatrice, gratuite et souveraine de Dieu, tandis que la « paix » est tout simplement son résultat, à savoir la réconciliation avec Dieu.

« Grâce » et « paix » sont donc les deux mots-clés de l’Epître.

En 6.15, l’apôtre parle de la bonne nouvelle comme étant l’ « Evangile de paix ».

En 2.14, Jésus-Christ nous est présenté comme celui qui est « notre paix », après avoir fait la paix par la croix (2.15), cette paix qu’il est venu annoncer tant aux juifs qu’aux païens (2.17).

L’apôtre exhorte ainsi les croyants à conserver l’unité de l’Esprit par le lien de la paix (4.3).

Quant à la grâce, qu’il me suffise de rappeler ici ce verset que vous connaissez sans doute, et qui se trouve au verset 8 du chap. 2 : « C'est par la grâce en effet que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu. 9  Ce n'est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie. » (voir de même 4.7 ; 3.2, 7).

La grâce de Dieu, la faveur imméritée de Dieu, le don du salut par lequel Dieu prend l’initiative de la réconciliation : voilà l’Evangile qu’annonce l’apôtre Paul dans notre Epître.

La grâce de Dieu qui rend possible la paix, et sur laquelle se fonde l’humanité nouvelle en Christ.

 

Conclusion

Alors en conclusion je dirai ceci.

Cette nouvelle humanité qui vient de Dieu n’a que peu de chose à voir en réalité avec ces idéologies humanistes dont notre siècle a été le témoin tragique : une humanité sans Dieu, qui n’a d’autres espérances que celle d’un mieux être économique et qu’une égalité utopique entre les hommes.

Marx aussi, en effet, et d’autres après lui, a parlé de « l’homme nouveau » et de la « société nouvelle ». Nietzsche, lui, parlait du « surhomme » qui devait bientôt prendre les rênes de la destinée humaine, après s’être définitivement affranchi de la tutelle divine.

Sur cette vision résolument matérialiste et athée de la vie, se sont édifiées les nouvelles bases de notre occident, autrefois chrétien, donnant ainsi jour aux totalitarismes et aux différents systèmes politiques plus ou moins absolutistes qui ont jalonnés ce dernier siècle.

Seulement voilà : l’histoire de ces dernières décennies, avec ces deux guerres mondiales, ses Hitler et ses Staline, ses Goulags et ses camps de concentration, est là pour nous montrer le caractère illusoire et destructeur de cette humanité-là, de cet humanisme sans Dieu qui n’hésite pas à sacrifier des millions d’individus pour la réalisation de ses utopies sanguinaires.

Il est grand temps que les nations cessent d’ajouter foi à tous ces faux dieux pour se tourner résolument vers le Christ, l’unique Sauveur et Seigneur, le seul vrai Dieu, Lui, la Lumière des nations, le soleil de justice qui appelle chacun à une vie nouvelle.

« Si quelqu'un est en Christ, il est une nouvelle créature. Les choses anciennes sont passées ; voici : toutes choses sont devenues nouvelles. » (2 Co 5.17)

Le Psaume 2 nous le rappelle de façon saisissante : toute tentative de fonder notre existence en dehors de Dieu et de son Messie, en dehors du Christ donc, et de la Parole de Dieu, est irrémédiablement vouée à l’échec.

La nouvelle humanité ne peut être que l’œuvre de Dieu, et non des hommes.

L’Eglise est l’œuvre de Dieu.

C’est là le message central de notre Epître, message que je vous invite, ce matin encore, à prendre en considération.

Considérez, frères et sœurs, votre élection en Christ, et la plénitude de sa grâce dont vous avez été l’objet.

Vous êtes la nouvelle création de Dieu.

Vous êtes la nouvelle humanité, la nouvelle société avec laquelle Dieu a fait alliance, et qui est appelée à la gloire.

Soyez donc ses serviteurs fidèles, et ses vivants témoins, en attendant le jour de la pleine réalisation du dessein de Dieu, comme il est écrit :

Apocalypse 21:1  Je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n'était plus.

2  Et je vis descendre du ciel, d'auprès de Dieu, la ville sainte, la nouvelle Jérusalem, prête comme une épouse qui s'est parée pour son époux.

3  J'entendis du trône une forte voix qui disait: Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes! Il habitera avec eux, ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux.

4  Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu.

5  Et celui qui était assis sur le trône dit: Voici, je fais toutes choses nouvelles. Et il dit: Ecris; car ces paroles sont certaines et véritables.

 

Amen !