Prédication Ephésiens 2.11-22

ERE Paris – 19 mars 2000

 Pasteur Vincent BRU

 Titre : « De l’aliénation à la réconciliation, ou : Une nouvelle humanité » !

Lectures : Es 57.14-19 ; 1 P 2.4-5

 

11  Souvenez-vous donc de ceci : autrefois, vous, païens dans la chair, traités d'incirconcis par ceux qui se disent circoncis et qui le sont dans la chair et par la main des hommes,

12  vous étiez en ce temps-là sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde.

13  Mais maintenant, en Christ-Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang de Christ.

14  Car c'est lui notre paix, lui qui des deux n'en a fait qu'un, en détruisant le mur de séparation, l'inimitié.

15  Il a dans sa chair annulé la loi avec ses commandements et leurs dispositions, pour créer en sa personne, avec les deux, un seul homme nouveau en faisant la paix,

16  et pour les réconcilier avec Dieu tous deux en un seul corps par sa croix, en faisant mourir par elle l'inimitié.

17  Il est venu annoncer comme une bonne nouvelle, la paix à vous qui étiez loin et la paix à ceux qui étaient proches ;

18  car par lui, nous avons les uns et les autres accès auprès du Père dans un même Esprit.

19  Ainsi donc, vous n'êtes plus des étrangers ni des gens de passage ; mais vous êtes concitoyens des saints, membres de la famille de Dieu.

20  Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre de l'angle.

21  En lui, tout l'édifice bien coordonné s'élève pour être un temple saint dans le Seigneur.

22  En lui, vous aussi, vous êtes édifiés ensemble pour être une habitation de Dieu en Esprit.

 

Chers frères et sœurs en Christ, le texte de ma prédication de ce matin nous introduit dans cette grande et belle vérité de notre réconciliation en Christ, réconciliation avec Dieu tout d’abord, réconciliation entre les hommes ensuite.

Nous avons vu il y a quinze jours quelle était l’étendue de notre misère devant Dieu, la situation d’aliénation dans laquelle tout homme se trouve depuis la Chute, la révolte d’Adam.

Ep 2.1  Pour vous, vous étiez morts par vos fautes et par vos péchés…

Tel est le diagnostique de l’apôtre Paul sur notre condition devant Dieu, ce que tout homme est par nature.

« Morts par vos fautes et par vos péchés » !

Le salaire du péché, c’est la mort !

La désobéissance à la Loi de Dieu, le fait de vivre sans Dieu conduit inexorablement à la mort.

Vivre sans Dieu, c’est déjà être mort !

Car Dieu a créé l’homme pour Lui, et le cœur de l’homme est sans repos jusqu’à ce qu’il repose en Dieu, le souverain Bien, la source de tout bien.

Au verset 4, Paul exalte la miséricorde de Dieu en Christ, par qui il nous a rendus à la vie, seulement par grâce.

4  Mais Dieu est riche en miséricorde et, à cause du grand amour dont il nous a aimés,

5  nous qui étions morts par nos fautes, il nous a rendus à la vie avec le Christ--c'est par grâce que vous êtes sauvés…

La grâce de Dieu en Christ ! Voilà bien le cœur du message de l’Evangile, et rien ne saurait davantage nous émerveiller, rien ne devrait davantage emporter notre reconnaissance et notre joie.

L’apôtre Paul, dans notre texte, nous invite à nous souvenir de cette grande et belle vérité de notre réconciliation, de notre salut en Christ, alors que nous étions autrefois sans Christ, sans espérance et sans Dieu dans le monde.

 

1.      Ce que nous étions autrefois : une humanité aliénée (vv. 11-12)

Je lis au verset 11 :

11  Souvenez-vous donc de ceci : autrefois, vous, païens dans la chair, traités d'incirconcis par ceux qui se disent circoncis et qui le sont dans la chair et par la main des hommes,

12  vous étiez en ce temps-là sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde.

Notez que Paul s’adresse ici, dans cette Epître aux Ephésiens, à des chrétiens d’origine païenne.

Dans les versets précédant, Paul a dépeint l’humanité dans son ensemble, juifs et païens confondus.

A présent, Paul vise particulièrement le monde païen avant la venue de Jésus-Christ, ceux que les juifs –les « circoncis »– désignaient non sans un certain mépris d’ « incirconcis ».

La circoncision était en effet, dans l’AT, le signe de l’appartenance au peuple de Dieu.

Les païens n’avaient aucunement part aux promesses de l’alliance, ils étaient  « privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse ».

Et par conséquent « sans espérance et sans Dieu dans le monde » !

Etre sans Dieu dans le monde, c’est forcément être sans espérance.

Et telle était bien la situation des nations païennes sous l’ancienne disposition de l’alliance.

En Romains 9.4-5 Paul énumère les avantages, les privilèges des juifs, comme peuple de l’alliance : « les Israélites –dit-il–, à qui appartiennent l'adoption, la gloire, les alliances, la loi, le culte, les promesses, 5  les patriarches, et de qui est issu, selon la chair, le Christ, qui est au-dessus de toutes choses, Dieu béni éternellement. Amen ! »

Dans notre texte, Paul énumère les désavantages des païens.

Ils sont « sans Christ », privés du Messie, privés des promesses de l’alliance, privés d’espérance et de Dieu lui-même !

Au verset 13, Paul résume tous ces désavantages des païens en disant qu’ils étaient « loin », étrangers à Dieu et à son peuple.

Le drame de l’homme, depuis la Chute, c’est d’être loin du Seigneur, loin de Dieu, la source de la Vie.

Il y a une distance infranchissable entre l’homme pécheur et Dieu, et telle était aussi notre condition, frères et sœurs, avant notre conversion.

Nous étions « loin » du Seigneur, nous étions « étrangers » à Dieu et à son peuple, nous étions des « enfants de colère comme les autres » !

Mais le Seigneur a fait de nous ses enfants, il a fait de nous son peuple, dans son amour et dans sa grâce.

 

 

2.      Ce que Jésus-Christ a fait pour nous : notre réconciliation (vv.13-18)

Je lis au verset 13 :

13  Mais maintenant, en Christ-Jésus, vous qui autrefois étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang de Christ.

Autrefois, dit l’apôtre Paul, vous étiez sans Christ, étrangers aux alliances de la promesses, sans espérance et sans Dieu dans le monde…

Mais maintenant, maintenant que le Christ vous a racheté, maintenant que vous avez placé votre confiance en Christ, vous êtes devenus proches par le sang de Christ !

Vous étiez loin de Dieu à cause de votre péché, mais voilà qu’en Christ Jésus, vous êtes devenus proches !

En Jésus-Christ, nous avons un libre accès auprès du Père, de sorte que nous pouvons vraiment entrer dans la proximité de Dieu.

Notre Dieu n’est pas un Dieu silencieux et lointain, le Dieu des philosophes et des savants, le « dieu inconnu » des païens (Ac 17.23), mais c’est le Dieu-Père, le Dieu qui se fait connaître dans et par sa révélation, le Dieu qui nous aime et que nous sommes appelés à aimer.

14  Car c'est lui notre paix, lui qui des deux n'en a fait qu'un, en détruisant le mur de séparation, l'inimitié.

Le mur de séparation dont il est question ici désigne, incontestablement le mur de pierre qui séparait le parvis réservé aux païens des trois autres parvis du temple de Jérusalem qui étaient réservés aux prêtres, aux juifs.

Il faut mesurer ici le fossé qui existait alors entre les juifs et les païens eu égard à l’alliance avec Dieu.

Les païens étaient considérés par les juifs comme des étrangers vraiment, des sans-Dieu qui n’avaient même pas le droit de pénétrer dans le temple, sous peine de mort.

Les païens n’avaient pas le droit de s’approcher de l’enceinte du temple ; ils devaient se tenir à l’écart, et ne franchir en aucun cas le mur de pierres sur lequel étaient gravés, à intervalles réguliers, des avertissements en grecs et en latin.

On a retrouvé deux de ces inscriptions en grec, dont une qui dit ceci : « Aucun étranger ne peut franchir la barrière qui entoure le temple. Celui que l’on surprendra sera responsable de la mort qu’il subira. »

Ce mur autour du temple de Jérusalem constitue donc le fond historique, social et religieux d’Ephésiens 2.

Si tous les hommes, comme nous le lisons aux versets 3 et suivants, sont étrangers à la vie de Dieu à cause du péché, les païens étaient de surcroît étrangers au peuple de Dieu, au peuple de la promesse.

Le mur de séparation était le symbole visible de cette double aliénation ou inimitié des païens vis-à-vis de Dieu d’une part, et vis-à-vis des juifs, du peuple élu d’autre part.

Seulement voilà que notre texte dit que Jésus-Christ a détruit ce mur de séparation, par sa mort sur la croix.

Il a fait en sorte que les païens puissent avoir accès à la nouvelle humanité de Dieu, la nouvelle société de Dieu qui transcende toutes les frontières culturelles et raciales.

Nous savons que le temple de Jérusalem, et donc aussi le mur de séparation a été détruit en l’an 70 par les romains.

Le symbole a donc était effectivement détruit, comme Jésus l’avait prédit de son vivant, mais la réalité l’avait été déjà bien avant, à la Croix, où le Christ a pris sur lui la malédiction de la Loi qui pesait sur nous, et où il nous a réconciliés avec Dieu.

15  Il a dans sa chair annulé la loi avec ses commandements et leurs dispositions, pour créer en sa personne, avec les deux, un seul homme nouveau en faisant la paix,

16  et pour les réconcilier avec Dieu tous deux en un seul corps par sa croix, en faisant mourir par elle l'inimitié.

Voilà ce que Jésus-Christ a fait pour nous et pour notre salut.

En Jésus-Christ, il n’y a plus ni juifs ni grecs, ni proches ni lointains, mais seulement des hommes et des femmes aimés de Dieu, qui peuvent librement et gratuitement accéder au trône de la grâce, et entrer dans l’intimité de Dieu.

17  Il est venu annoncer comme une bonne nouvelle, la paix à vous qui étiez loin et la paix à ceux qui étaient proches ;

18  car par lui, nous avons les uns et les autres accès auprès du Père dans un même Esprit.

Nous avons, les uns et les autres, et qui que nous soyons, quel que soit notre passé, accès auprès du Père !

Nous pouvons nous approcher de Dieu librement et joyeusement, parce que le Christ a tout payé pour nous.

Le Ciel s’est largement ouvert pour nous, et par la foi, nous pouvons goûter à nouveau à la communion avec Dieu, et vivre de sa vie.

Si les versets 11 à 12 nous révèlent quelle était notre condition « autrefois », lorsque nous étions sans Christ, sans espérance et sans Dieu dans le monde : les païens avant la venue de Jésus-Christ, ou bien nous-même avant notre conversion ;

Les versets 13 à 18 nous parlent de ce que Jésus-Christ a fait pour nous et pour notre salut, de sorte que « maintenant », de lointains, nous sommes devenus « proches », d’aliénés nous sommes réconciliés avec Dieu.

Dans les versets qui suivent, l’apôtre Paul fait état de la nouvelle humanité ainsi créée par Dieu, la nouvelle société de Dieu qu’est l’Eglise.

 

3.      Ce que nous sommes devenus : la nouvelle humanité de Dieu (vv. 19-22)

Je lis au verset 19 :

19  Ainsi donc, vous n'êtes plus des étrangers ni des gens de passage ; mais vous êtes concitoyens des saints, membres de la famille de Dieu.

20  Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre de l'angle.

21  En lui, tout l'édifice bien coordonné s'élève pour être un temple saint dans le Seigneur.

22  En lui, vous aussi, vous êtes édifiés ensemble pour être une habitation de Dieu en Esprit.

 

La nouvelle humanité, la nouvelle société de Dieu est dépeinte ici sous trois traits, trois réalités qui chacune recouvre un aspect de ce que l’Eglise est aux yeux de Dieu.

Le royaume de Dieu (v. 19a) tout d’abord.

Vous êtes « concitoyens des saints », dit l’apôtre, citoyens du royaume de Dieu, du peuple de Dieu, le peuple objet de son élection, le peuple sur lequel Dieu règne.

Le fait d’être unis à Jésus-Christ par la foi fait de nous des citoyens du royaume de Dieu.

Il s’agit là d’un royaume où les juifs et les païens sont sur un pied d’égalité, un royaume qui n’est ni juif ni romain, mais international et interracial, beaucoup plus beau et plus durable que n’importe quel empire terrestre.

Concitoyens des saints, nous sommes aussi, membres de la famille de Dieu (v. 19b).

Le Christ ne fait pas seulement de nous des citoyens du royaume, il fait de nous aussi des membres de la famille de Dieu, de sorte que Dieu n’est pas seulement notre Roi, notre Seigneur, mais il est aussi, d’abord notre Père !

C’est comme tel que nous l’invoquons, et que nous sommes vraiment « proches » de Lui.

Etre membre de la famille de Dieu fait aussi de nous des frères et sœurs en Christ, une communauté fraternelle où nous pouvons expérimenter vraiment l’amour du prochain, par delà les frontières raciales, et goûter aux bénédictions divines.

Mais les chrétiens ne sont pas seulement citoyens du royaume et membre de la famille de Dieu ; ils sont le temple de Dieu (v. 20-22), l’édifice de Dieu qui s’édifie sur le fondement des apôtres et des prophètes, de l’Ecriture sainte, la Bible.

21  En lui, tout l'édifice bien coordonné s'élève pour être un temple saint dans le Seigneur.

Plus besoin désormais de temple de pierres !

Les chrétiens eux-mêmes, l’Eglise sont le temple de Dieu, l’habitation de Dieu, les signes visibles de la présence de Dieu sur toute la surface de la terre.

Plus besoin non plus de se rendre à Jérusalem, pas plus d’ailleurs qu’à Rome ou à Genève…

Il suffit de vivre la réalité de l’Eglise là où le Seigneur nous place et où il nous est donné de partager ensemble la joie de notre appartenance au Christ-Seigneur.

Pourvu que l’Eglise soit solidement enracinée et bâtie sur le fondement des apôtres et des prophètes, sur la Parole de Dieu, l’Eglise dont Jésus-Christ constitue la pierre d’angle qui maintient solidement unies les différentes parties de l’édifice qui n’a jamais de cesse de s’édifier, jusqu’au retour de Jésus-Christ.

Citoyens du royaume, membre de la famille de Dieu, temple de Dieu : voilà ce que nous sommes, chrétiens, ce que le Christ a fait de nous, tandis que nous étions autrefois des étrangers, sans espérance et sans Dieu dans le monde !

 

Alors en conclusion je dirai ceci.

L’Eglise est véritablement la nouvelle humanité de Dieu, la société nouvelle créée selon Dieu, en Christ.

Cette nouvelle société de Dieu est bien différente de toutes celles qui ont vu le jour depuis le commencement de l’histoire.

La société de Dieu n’est pas la société des hommes ; elle n’est pas l’œuvre de l’homme, le résultat d’une idéologie politique simplement humaine.

L’homme naturel ne sait qu’ériger des barrières entre les hommes, entre les cultures, entre les races, les couleurs, les classes sociales.

Pensez, il n’y a pas si longtemps, au fameux rideau de fer, au mur de Berlin, et à tous ces murs que les hommes érigent entre eux, pour des raisons souvent plus que douteuses.

Pensez aussi aux goulags, aux camps de concentrations et autres prisons injustes, où l’on met des hommes derrière des murs, ou des fils barbelés, pour les tenir à l’écart, sous prétexte qu’ils ne sont pas politiquement corrects !

L’Eglise elle-même, avec ses multiples divisions, ces dénominations, ces querelles de clocher, et même au sein de chacune d’elle, à l’intérieur même de notre communauté : tant de disputes inutiles souvent, de déchirements, de divisions, de médisances, de ségrégation raciale, sociale ou autre.

Nous devrions, chrétiens, donner de l’Eglise, du peuple de Dieu, de la famille de Dieu que nous sommes, du temple de Dieu une toute autre image, l’image de l’amour fraternel, l’image d’hommes et de femmes qui savent bien ce que signifient la générosité, l’abnégation, le don de soi, l’amour de Dieu et du prochain, le pardon et la réconciliation.

L’image d’une famille unie, vraiment, par delà toutes nos différences, une famille où règne l’harmonie et l’amour, et où chacun a sa place vraiment, où chacun se sente chez lui, et où il fait véritablement bon vivre.

Un foyer chaleureux où le Christ est véritablement honoré par l’amour que nous nous portons les uns pour les autres, sans considération de personne.

Voilà ce que nous voulons être, frères et sœurs, aussi, tout au long des années qui viennent.

Que cela soit vraiment une priorité pour nous.

Amen !