Prédication 2ème dimanche après Pâques 2001

E.R.E. de Paris – 22/04/2001

Pasteur Vincent BRU

Lectures : Ac 5.27-41

Ap 5.11-14

Jn 21.1-19

 

« L’amour du Ressuscité »

 

Chers frères et sœurs en Christ, le texte de ma prédication de ce matin fait suite au récit des deux apparitions de Jésus à ses disciples, au chapitre 20 de l’Evangile selon Jean.

C’est la troisième apparition du Ressuscité à ses disciples.

Celle-ci a lieu en Galilée, au bord de la mer de Tibériade, tandis que les disciples, et notamment l’apôtre Pierre, sont retournés à leur métier de pêcheur : Simon Pierre, Thomas appelé Didyme, Nathanael, Jacques et Jean, fils de Zébédée, et deux autres disciples anonymes.

Ils sont retournés à leur vie passée, et ils ne savent sans doute pas encore ce qui les attend.

Il semble qu’à cette heure, les disciples n’aient pas encore vraiment réalisé la mission que le Christ ressuscité leur a confiée.

Le Maître n’étant plus là, présent au milieu d’eux, ils sont retournés à leurs occupations, sans doute dans l’attente de la réalisation de la promesse de l’envoi du Saint-Esprit, qui aura lieu le jour de la Pentecôte.

Ils sont retournés à leurs activités passées, à leur train-train quotidien.

Ils sont retournés à la pêche. Ils ont jeté leur filet à la mer.

Seulement voilà, « cette nuit-là, nous est-il dit, ils ne prirent rien » !

Le filet est resté vide !

Pas un seul poisson ! Rien pour satisfaire leur attente. Le filet ne s’est pas rempli.

Ne devons-nous pas là voir une illustration de la vanité et de la stérilité de nos efforts humains, en particulier dans la mission, l’évangélisation, mais aussi dans la vie en général, sans le secours du Christ ?

D’aucuns ont vu en effet dans ce filet que les disciples ont jeté à la mer une image de l’Eglise missionnaire, l’Eglise conquérante en marche pour l’évangélisation et la conquête du monde pour le Christ.

Le filet, c’est l’Eglise. La mer représente le vaste monde dans lequel Dieu nous a placé. Quand au poissons, ce sont les hommes que Dieu appelle et qu’il ajoute à l’Eglise, tous ceux qui ont la foi en Jésus.

On peut aussi y voir une illustration de tous nos efforts humains pour remplir notre vie, pour lui donner un sens, en  accumulant des richesses, des biens terrestres afin de combler le vide de notre cœur.

Nos efforts d’évangélisation, tout comme, du reste, toutes tentatives humaines de réaliser un sens à sa vie sans l’aide de Dieu, ressemblent fort à l’expérience des disciples sur la mer de Tibériade dès lors qu’ils ne sont pas soutenus et accompagnés par la prière et sans la présence agissante du Christ en nous par son Esprit.

Psaumes 127:1  Si l'Eternel ne bâtit la maison, Ceux qui la bâtissent travaillent en vain…

De-même, au chapitre 15 de l’Evangile selon Jean, Jésus dit :

Jn 15.4  Demeurez en moi, et je demeurerai en vous. Comme le sarment ne peut de lui-même porter du fruit, s'il ne demeure attaché au cep, ainsi vous ne le pouvez non plus, si vous ne demeurez en moi.

La présence de Jésus change tout, et c’est de la qualité de notre relation avec lui que dépend en définitive la qualité et l’efficacité de notre vie d’Eglise et de notre vie de chrétien.

6  Il leur dit : Jetez le filet du côté droit de la barque, et vous trouverez. Ils le jetèrent donc, et ils ne pouvaient plus le retirer, à cause de la grande quantité de poissons.

Une seule parole du Seigneur a suffit pour que le filet se remplisse !

Il a suffit que les disciples accomplissent ce qui leur était ordonné par le Maître, qu’ils n’ont d’ailleurs pas tout de suite reconnu, pour que leur échec se transforme en victoire, et leur tristesse en joie.

Telle est, chers amis, la condition d’une vie pleine et réussie : confier sa vie, que dis-je, donner sa vie au Christ-Seigneur, le Ressuscité, et marcher en conformité de vie avec son enseignement, dans une étroite relation de dépendance et d’amour avec lui.

La plupart des gens aujourd’hui, y compris parmi les chrétiens, ne consacrent leur vie qu’aux choses passagères de ce monde, comme si toute la réalité se réduisait à cela.

Ils ne pensent qu’aux choses de la terre, et s’imaginent qu’ils pourront aisément étancher là leur soif de bonheur et d’amour.

Et voilà pourquoi ils sont, bien souvent, sans espérance, et sans joie véritable.

Leurs filets, en réalité, ne sont point remplis ! Ils ne se remplissent pas !

Parce que le cœur de l’homme a été fait pour Dieu, et qu’il ne peut trouver son repos véritable que dans la communion retrouvée avec Dieu, dans la reconnaissance de son amour pour nous en Jésus-Christ.

 

Le dialogue qui suit entre Jésus et Pierre illustre cette grande et belle vérité.

15  Après qu'ils eurent mangé, Jésus dit à Simon Pierre : Simon, fils de Jonas, m'aimes-tu plus que ne m'aiment ceux-ci  ? Il lui répondit : Oui, Seigneur, tu sais que je t'aime. Jésus lui dit : Pais mes agneaux.

La question de Jésus à Pierre nous interpelle en ce sens qu’elle pourrait tout aussi bien s’adresser à chacun de nous ici présent.

« Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu ? »

La question posée à Simon-Pierre nous est aussi posée, et c’est à chacun de nous d’y répondre pour lui-même : aimes-tu le Seigneur Jésus ? Aimes-tu le Christ ?

Quelle place Jésus-Christ occupe-t-il dans ta vie, et dans quelle mesure celui-ci passe-t-il vraiment avant toute autre préoccupation et tout autre amour ?

Avez-vous pour Jésus-Christ un amour vrai, un amour profond et solide, un amour qui se manifeste dans des actes, et qui engage votre être tout entier ?

N’est-ce pas là d’ailleurs l’exigence première, l’exigence fondamentale de la Loi de Dieu que d’aimer le Seigneur de tout notre être, de toute notre personne ?

Marc 12.30  Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta pensée, et de toute ta force.

Cet amour plus fort que la mort, cet amour exclusif qui nous fait placer les choses de Dieu à la première place dans notre vie.

C’est cet amour-là qui a fait dire à l’apôtre Paul :

Ph 1.21  Christ est ma vie, et la mort m'est un gain.

De-même, en 2 Corinthiens 5:8, il dit ceci :  nous sommes pleins de confiance, et nous aimons mieux quitter ce corps et demeurer auprès du Seigneur.

L’amour de l’apôtre Paul pour celui qui l’avait appelé à sa lumière était tel qu’il considérait sa propre mort comme un gain, car il ne concevait rien de plus admirable, rien de plus aimable et rien de plus désirable que de demeurer auprès du Seigneur !

Peut-on imaginer un amour plus grand ?

Et est-ce bien là aussi l’amour que nous avons nous-mêmes pour le Christ ?

Aimer le Christ ne consiste pas simplement à éprouver des sentiments d’affection ou de sympathie pour lui, une simple amitié, une vague admiration, une vénération. Cela va beaucoup plus loin.

Le verbe employé par Jésus dans sa question à Pierre est le verbe fort et spécifique agapaô , qui signifie un amour en acte, l’amour don de soi, libre et volontaire, dont l’illustration la plus sublime n’est autre que le don du Fils par le Père, le sacrifice unique et parfait de notre Seigneur Jésus-Christ, mort et ressuscité pour nous, par amour pour nous :

Jn 3.16  « Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle ».

C’est aussi de cet amour là dont Jésus parle lorsqu’il dit :

Jn 14.23  Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera ; nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure chez lui.

Et encore :

12  C'est ici mon commandement : Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. 

13  Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.

Et c’est encore de cet amour là auquel il fait allusion lorsqu’il dit :

Mt 10.37  Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n'est pas digne de moi…

Ou encore :

Mt 6.24  Nul ne peut servir deux maîtres, car ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mamon.

Vous voyez qu’il y a un amour du Christ, un amour de Dieu qui est unique et exclusif, un amour spécifique qui doit passer avant tous les autres, et sur lequel doit être fondé tous les autres.

L’amour du prochain lui-même doit s’enraciner dans l’amour de Dieu et de celui qu’il a envoyé, Jésus-Christ.

L’amour de Dieu est premier, et tout autre amour, tout autre intérêt que nous pouvons porter pour telle ou telle chose dans notre vie, devrait lui être subordonné.

C’est à cette condition-là que nous pouvons goûter à la vraie joie et à la vraie liberté, et que nous pouvons aussi être vraiment utiles pour son service.

C’est ce qui apparaît au verset 15 où Jésus dit à Pierre : « Pais mes agneaux ».

Certes, l’apôtre Pierre avait renié le Christ par trois fois, mais Jésus réhabilite pleinement celui-ci dans ses fonctions de berger de son troupeau, de l’Eglise, en lui rappelant que l’amour est la condition nécessaire et suffisante pour exercer cette responsabilité pastorale, au nom du souverain Berger.

Par trois fois Pierre avait renié le Christ. Par trois fois aussi Jésus conduit Pierre à attester son amour pour Lui, lui témoignant ainsi la confiance qu’il lui accorde, par delà ses faiblesses et ses insuffisances.

Car le Ressuscité n’ignore pas les faiblesses de ceux qu’il appelle à le servir, nos faiblesses.

Il nous appelle à le suivre malgré tout, et à trouver dans l’amour pour lui, un amour qui se donne et qui va jusqu’au don de soi-même, de notre propre vie, la force d’accomplir la vocation qu’il nous adresse et qu’il adresse à l’Eglise.

L’essentiel n’est pas dans la force, dans nos capacités naturelles à faire ce qui nous est demandé, mais bien dans l’amour que nous portons pour « celui qui nous a appelés des ténèbres à son admirable lumière », Jésus-Christ, notre Sauveur.

Ainsi donc, frères et sœurs, comme Pierre, devenons des « pêcheurs d’hommes », et trouvons dans l’amour du Seigneur, l’amour pour le Christ vainqueur, le Ressuscité, la force du service et la vitalité du témoignage à la gloire de son nom.

Amen !